Avis de tempête solaire sur le GPS et les réseaux cellulaires

Anthony Nelzin-Santos |

La NASA avait tiré la sonnette d'alarme et 2013 devait être l’année d’une tempête solaire historique et cataclysmique… qui n’est toujours pas arrivée. Le Soleil connaît néanmoins un pic d’activité qui pourrait avoir des conséquences sur nos équipements électroniques.






Les aurores boréales sont les manifestations les plus visibles de l’activité solaire. Image (cc) Jim Trodel.




En théorie, l’activité du Soleil est régie par un cycle d’une période moyenne de 11 ans ; en pratique, cette période peut varier de 10 à 13 ans. Ainsi, le 23e cycle (on compte les cycles depuis 1761), commencé en mai 1996, a fini avec un peu de retard en janvier 2008. Depuis, l’activité solaire a été remarquablement basse, mais le maximum du 24e cycle, dont l’annonce a de maintes fois été repoussée par la NASA, est en cours depuis le mois de mai.



Les images du satellite Solar Dynamics Observatory (SDO), placé en orbite héliosynchrone, permettent d’observer un des plus grands trous coronaux observés ces derniers mois. Plus précisément un trou coronal ouvert qui « éjecte » de la matière au-delà de la couronne solaire, formant ainsi un flux de plasma constitué d’ions et d’électrons que l’on appelle le vent solaire. L’épisode actuel pourrait être de suffisamment grande envergure pour déformer le bouclier magnétique de la Terre et ainsi provoquer des dégâts.






En bleu très foncé (couleurs simulées à partir d’une observation dans des longueurs d’onde du domaine ultraviolet), le trou coronal visible ces derniers jours. Image SDO.




Première victime, les satellites en haute altitude : « les satellites en orbite basse ne craignent pas grand-chose en cas de tempête, mais les satellites en orbite moyenne et les géostationnaires oui », explique Martin Fournier, doctorant en astrochimie à l’Université de Rennes 1. Or la plupart des satellites dédiés au positionnement (GPS, Glonass, Compass et Galileo) sont en orbite moyenne, et les satellites de télécommunication ou de télévision sont en orbite géostationnaire.



« Vu la fréquence rare de ce genre de phénomène » et puisqu’ils « sont de toute manière irradiés par les particules solaires », les satellites ne sont pas particulièrement protégés contre ce genre de phénomène. « Les blindages contre les radiations coûtent cher et sont lourds », donc ils ne sont utilisés que dans le cas de l’exploration spatiale, et encore avec une fiabilité toute relative (« s’il y avait eu une éruption pendant les missions Apollo, c’en aurait été fini du programme »).






Les différentes altitudes des satellites (cliquez pour agrandir). Image (cc) Mark Mercer.




Deuxième victime, les équipements au sol : « les lignes électriques aériennes sont assez sensibles, [NdR : surtout les plus longues], de même que les relais de forte puissance (grosses antennes de télécommunication et de diffusion de la télévision…), car ils forment de grands champs électromagnétiques qui ont tendance à attirer les particules solaires chargées qui passent par là. » Les transformateurs électriques peuvent aussi être touchés, mais la perspective d’un black-out de plusieurs heures comme au Québec en 1989 est à écarter :




Les nombreux accidents au Canada s’expliquent par le nombre réduit de lignes très longues : la perte ou la déconnexion d’une unité de production conduit à la surcharge sur les autres nœuds du réseau et à un effondrement en chaîne du système. En France, les lignes et les centrales sont mieux réparties. On dit souvent que la Bretagne est mal desservie, mais ce qui arrête le mieux les rayonnements, c’est l’eau — et en Bretagne, ce n’est pas ce qui manque !




Que craindre, donc en cas de véritable tempête solaire ? Le GPS est assez résilient : il y a suffisamment de satellites de positionnement pour que le système tienne face à la perte de quelques satellites — et comme la plupart des équipements modernes (comme l’iPhone 4S et l’iPhone 5) voient aussi le Glonass, le risque de se retrouver complètement perdu est minimisé.



Des coupures ponctuelles de courant et du réseau cellulaire sont à prévoir, dont l’ampleur dépendra de la capacité des exploitants à rétablir le fonctionnement de leurs réseaux. En cas de « tempête du siècle », ce qui n’est a priori pas pour cette année, ce sera le principal problème, aux conséquences humaines et économiques potentiellement graves.



Enfin, rassurez-vous, vos propres appareils ne craignent rien : la plupart d’entre eux sont équipés de blindages internes qui font office de cage de Faraday. La coque tout en métal de l’iPhone 5 pourrait aussi le protéger un peu plus que le plastique de la plupart de ses concurrents.

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