Un pavé dans la mare Twitter

Nicolas Furno |
Le réseau social Twitter a construit son succès sur sa formule extrêmement simple (des messages de 140 caractères et… c'est à peu près tout), mais aussi sur des applications et des usages innovants pour lesquels le réseau n'avait pas été pensé à l'origine. Twitter sert autant à raconter sa vie et décrire le monde, qu'à envoyer des images, faire de la publicité, créer des flux d'actualité, donner sa position ou encore chercher un appartement.

De la même manière, les clients Twitter ont toujours été à la fois très nombreux et un terrain favorable à l'innovation. Sur Mac OS X et iOS, on ne compte même plus le nombre de clients différents, certains faisant le pari de la simplicité et de l'interface élégante ou originale, quand d'autres transforment le réseau pour lui ajouter un grand nombre de fonctions évoluées.



Une simple recherche sur le Mac App Store montre le grand nombre d'applications Twitter disponibles. C'est encore plus vrai dans l'App Store iOS.


Alors que le marché des clients Twitter ne s'est jamais aussi bien porté, Ryan Sarver, responsable de l'API Twitter indispensable aux applications, a lancé un pavé dans la mare en publiant en fin de semaine une tribune sur le groupe officiel de l'API. Cette tribune fait le point sur l'écosystème Twitter et évoque à la fois les opportunités de développement offert par cet écosystème, mais aussi, et surtout, sa cohérence. Ryan Sarver appelle à une plus grande cohérence des applications et au strict respect des règles d'utilisation de l'API Twitter, trop souvent oubliées par les développeurs selon lui. Les utilisateurs sont perturbés par des fonctionnements modifiés par les clients, ou quand une application n'utilise pas le vocabulaire officiel. Ryan Sarver met l'accent sur le respect des règles de Twitter à propos de la vie privée et indique que Twitter désactive plusieurs centaines d'applications chaque semaine pour non-respect des règles.

En conséquence, le réseau social a modifié les conditions d'utilisation de son API et entend bien les faire respecter. On peut y lire notamment qu'une application (au sens large, il peut s'agir d'un service web) ne doit pas envoyer de tweet ou modifier un compte Twitter sans en demander explicitement la permission (point II.1.B). Voilà qui devrait permettre de mettre un terme aux dizaines de services qui proposent une analyse quelconque et envoient automatiquement le résultat sous la forme d'un tweet.

Cet appel au respect des conditions d'utilisations n'a rien d'extraordinaire, mais le pavé provient d'un autre point évoqué par cette tribune. Ryan Sarver fait le point sur l'utilisation des clients officiels : il en existe désormais sur un grand nombre de plateformes, et notamment sur les plateformes mobiles majeures (iOS, Android, Blackberry, Windows Phone, etc.) et ces clients sont extrêmement populaires, sans surprise : 90 % des utilisateurs de Twitter utilisent au moins une fois par mois un client officiel.



Le client Twitter officiel sur Mac OS X (Gratuit)


Un succès incontestable qui remet en cause l'intérêt de simples clients alternatifs. Même s'il ne le dit pas explicitement dans sa tribune, Ryan Sarver explique aux développeurs que les clients Twitter ne sont pas nécessaires s'ils n'ajoutent rien par rapport aux clients officiels. « Des développeurs nous demandent s'ils doivent construire des clients qui imitent ou reproduisent l'expérience des clients Twitter officiels. La réponse est non. », explique-t-il ainsi, en précisant immédiatement que les clients actuels peuvent continuer d'exister tant qu'ils respectent les règles d'utilisation du service.

Mais quid de nouveaux clients ? Quel avenir, par exemple, pour le très prometteur Tweetbot attendu dans les prochaines semaines sur iOS ? Ses concepteurs sont connus sur l'App Store pour proposer des applications très simples, mais très bien pensées et extrêmement élégantes. Cela suffira-t-il à justifier son existence ? On suppose que le réseau social ne va pas du jour au lendemain refuser ce genre d'applications, mais on comprend que certains développeurs soient un peu amers après cette annonce assez inattendue. Faut-il le rappeler, les clients officiels Mac et iOS sont issus du rachat de Tweetie, un client Twitter qui n'ajoutait rien de plus au site Internet si ce n'est une très élégante interface…

En attendant, Ryan Sarver donne quelques exemples d'applications qui ont un intérêt en ajoutant des fonctionnalités, ou en exploitant les données de Twitter de manière spécifique. Dans la liste, on trouve quelques services très spécifiques, souvent dédiés aux entreprises comme SocialFlow ou MassRelevance, mais aussi des clients complets dont le fameux Seesmic qui font office de CRM sociaux, mais encore des services qui ajoutent du contenu à Twitter, comme Foursquare ou Instagram.

Difficile pour l'heure de connaître les conséquences précises de cette tribune pour les clients Twitter. Toujours est-il que le réseau social vient sans doute remettre en cause les projets de nombreux développeurs. S'il est légitime que Twitter mette en avant ses propres clients, interdire les clients alternatifs ne serait, en tout cas, certainement pas la meilleure chose à faire.
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