L'iPad va-t-elle cannibaliser le Mac ?

Anthony Nelzin-Santos |
Selon Trefis, une société qui développe un outil permettant de décomposer la valeur d'une action selon les produits de son entreprise, l'iPad pourrait cannibaliser les ventes de Mac portables de manière sensible.

L'action Apple côte actuellement 236 $, et Trefis estime qu'elle vaut 267 $ (il ne s'agit pas d'une estimation d'un objectif de cours, mais plutôt d'une estimation de la valeur potentielle de l'action à court terme en fonction de ses résultats futurs estimés, cf. la FAQ de Trefis). L'iPhone serait responsable de 51,5 % de la valeur de l'action, contre 18 % pour le Mac, et 2,8 % pour l'iPod. L'iPad représenterait 4,3 % de la valeur de l'action Apple.



On pourra toujours gloser autour de la méthodologie de Trefis : la corrélation entre chiffres de ventes (quand ils sont connus) et cours de l'action n'est pas directe, et les chiffres fournis restent parfois vagues. Mais un argument est à retenir : du profil des acheteurs de Mac portables dépendra la manière dont l'iPad viendra les concurrencer, Trefis distinguant deux profils : les créateurs de contenus, et les consommateurs de contenus.



Trefis estime ainsi qu'Apple écoulera 4 millions d'iPad cette année (elle se place ainsi dans la fourchette basse) et 8,5 millions d'ordinateurs portables (la fourchette moyenne), soit une part de marché de 5,4 % sur ce segment. Pour 2016, elle voit l'iPad s'écouler à 12,2 millions d'unités, contre 21 millions d'ordinateurs portables (8,7 % de parts de marché).



Ces conditions idéales pourraient être faussées par la structure de la clientèle des Mac portables. Si la majeure partie des clients sont des consommateurs de contenus, alors l'iPad sera un compagnon numérique parfait, et pourrait cannibaliser les ventes d'ordinateurs portables. Trefis rappelle que l'iPhone a pris le relais de l'iPod, voire a précipité son déclin relatif, jusqu'à constituer le premier business d'Apple.

Mais si la majeure partie des utilisateurs de Mac sont des créateurs de contenu, alors l'iPad ne sera pas suffisante, et elle pourrait se vendre beaucoup moins bien que prévu, alors que le marché des Mac portables ne devrait pas souffrir dans les années à venir. L'action Apple pourrait alors perdre près de 15 $ (6 %), les ordinateurs portables pesant 8,4 % de sa valeur, deux fois plus que l'iPad.

On ajoutera cependant quelques remarques à cette analyse qui ne manque pas d'intérêt. La première est qu'Apple présente son iPad comme un pont entre le téléphone et l'ordinateur portable, et que ce phénomène de cannibalisation pourrait être limité dans un premier temps — dans un futur plus lointain, l'histoire sera certainement toute autre.



Ainsi, selon un sondage de Gene Munster, certes réalisé sur un échantillon restreint et pas forcément représentatif, seuls 4 % des acheteurs d'iPad pensaient à acheter un ordinateur portable avant d'acheter l'iPad, et 96 % des acheteurs d'iPad pensent continuer à utiliser leur ordinateur portable. En disséquant leurs raisons d'achat, on ne trouve que des fonctions de consommation : surf sur le Web (74 %), lire des livres (38 %), consulter ses mails (32 %), regarder des vidéos (26 %), etc. Les deux produits sont donc complémentaires.

La seconde remarque est que s'il ne fait aucun doute qu'il y a plus de consommateurs que de créateurs de contenus sur Mac, ce doit être aussi le cas dans le monde d'en face. Et dans ce cas, l'iPad ne cannibalisera pas le Mac : avec l'iPhone en embuscade (deux tiers des acheteurs d'iPad en possèdent un), l'iPad permettra à Apple de conquérir de nouveaux utilisateurs, peut-être plus facilement encore qu'avec le Mac (26 % des acheteurs d'iPad ont un PC).
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