Moment raconte son sprint pour adapter son produit à une vente en Apple Store

Florian Innocente |

Avoir son produit choisi par Apple pour être vendu dans ses boutiques est flatteur mais c’est loin d’être de tout repos, comme l’explique Marc Barros, fondateur de Moment. Cette petite entreprise de 15 personnes, née d’un Kickstarter en 2014, a conçu des optiques et coques pour iPhone adaptées à la photographie mobile.

Barros avait été déjà approché par Apple au début 2015. Il avait toutefois décliné, jugeant qu’il n’était pas encore prêt pour ce mode de distribution. Lorsqu’il a été à nouveau sollicité, il raconte à FastCo Design avoir été davantage mortifié qu’emballé à la lecture du mail.

Les nouveaux packaging de Mophie à la sauce Apple, en 2015 — Cliquer pour agrandir

C’est une chose d’être choisi par Apple c’en est une autre d’être en mesure d’assumer les investissements que cela implique. Sans aucune certitude de retomber sur ses pieds. Jusque là, Moment vendait en direct depuis son site web. Le client paye, l’argent est encaissé immédiatement et les stocks sont constitués au fil de l’eau.

Avec Apple, comme avec n’importe quel distributeur de grande taille, il faut investir d’emblée pour produire un premier volume conséquent, puis payer l’expédition en boutiques et… espérer que le produit se vende.

S’il ne marche pas c’est une perte sèche et un stock qui vous revient sur les bras. S’il se vend bien, il faut être en mesure de réapprovisionner rapidement les stocks. Une flexibilité qui implique de disposer d’une trésorerie solide, qui n’ait pas été trop lourdement ponctionnée par les précédents investissements. En ajoutant à cela qu’Apple, comme ses pairs, paye ses fournisseurs à 45 jours. Toutes ces contraintes sont bien connues dans le monde de la vente mais elles sont toujours plus compliqués pour de petites structures.

Pour corser les choses, Apple ne s’était manifestée que quelques semaines seulement avant la date où elle espérait disposer du produit. Et elle oblige maintenant les fabricants à homogénéiser leurs emballages produits, ce qui signifiait pour Moment de refaire le sien.

Cela fait un peu moins d’un an que cette politique est entrée en vigueur, elle se concrétise par des boites sur fond blanc qui mettent bien en avant le produit, sans chichis.

Les emballages homogénéisés d'Incase et de Tech21 — Cliquer pour agrandir

Ce calendrier serré a fait que Moment, une fois que la décision d’y aller avait été prise, ne disposait plus que de 15 jours pour refaire son packaging. En temps normal, une société va s’accorder entre 3 et 4 mois pour tester ses idées. Canary, un fabricant de caméras domestiques vendues aussi en Apple Store, explique avoir mis quatre mois à créer son emballage en analysant principalement ceux d’Apple.

Le packaging de Canary, qui existait avant sa sélection par Apple et n'a pas nécessité de changements

En vendant ses produits en direct sur internet, Moment n’avait pas eu besoin de pousser très loin la réflexion sur le design de ses emballages. Quatre personnes se sont attelées à réaliser celui prévu pour les Apple Store. Il faut concevoir un packaging qui convienne aux clients finaux mais également au distributeur dont les exigences sont précisément documentées.

Dans le cas d’Apple, la boîte doit être majoritairement de couleur blanche. Ensuite c’est le produit, montré dans ses attributs les plus simples, qui tient la vedette. Il n’y a pas de mise en scène avec un utilisateur ou dans un lieu.

« Sur un emballage classique, la face avant de la boîte aurait comme objectif de répondre à la question du ‘Pourquoi ?’ Pourquoi est-ce que je voudrais acheter ce produit. » explique Barros « Mais avec Apple, la question devient ‘Qu’est-ce que c’est ?’. La face avant de notre boite indique simplement ‘Kit mobile de photographie’ » avec une photo toute simple de l’accessoire.

Les designers de Moment ont observé les boites déjà dans les rayons, de manière à trouver comment s’écarter un peu de cette rigueur dans la présentation. La plupart des autres boites avaient une présentation symétrique, ils ont alors fait l’inverse. Et pour sortir de cette masse de boites blanches, ils ont appliqué un estampage pour donner un petit peu plus de cachet.

À droite, la boite redessinée pour les Apple Store selon les règles d'Apple — Cliquer pour agrandir

Ce temps limité et ces exigences d’Apple ont eu néanmoins quelques vertus. On se pose moins de questions sur les couleurs, sur le texte à mettre en avant, sur le message à véhiculer, on va tout de suite à l’essentiel pour un résultat de très bonne facture.

Cette approche a fait florès et il n’est pas rare de voir des emballages épurés, dans le style de ceux d’Apple. « C’est difficile de ne pas être influencé par Apple aujourd’hui » constate le patron de Canary « Ils ont sans aucun doute défini un standard de qualité dans de nombreux domaines. Pour ce qui est des emballages, j’ai toujours aimé cette manière qu’a Apple de présenter quelque chose avec le moins d’explications possibles tout en vous permettant de comprendre immédiatement de quoi il retourne ».

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