San Bernardino : lorsque deux agents du FBI s'agaçaient de « l'hypocrisie » de Tim Cook

Florian Innocente |

Apple et le FBI semblent entretenir des relations qui passent par toutes les couleurs du spectre, que ce soit à un niveau public ou dans le secret des correspondances entre ses agents.

Début 2016, au moment où la Pomme refusait d’accéder à la demande du FBI à propos de l’iPhone de San Bernardino, deux agents du FBI exprimaient en privé tout le mal qu’ils pensaient de l’entreprise et de son patron.

Ces propos, de Peter Strzok, spécialisé dans le contre-espionnage et Lisa Page, une avocate de l’agence, ont été piochés par Business Insider au sein de milliers de SMS. Cette correspondance sert de base à une enquête sur un possible biais du FBI à l’encontre de Donald Trump (Peter Strzok avait conduit l’enquête sur l’utilisation par Hillary Clinton d’un serveur de mail privé et il avait failli rejoindre l’équipe du procureur Mueller qui enquête sur une possible collusion entre Moscou et l’équipe de campagne du président Trump).

Peter Strzok et Lisa Page

Le jour où James Comey, alors directeur du FBI, révélait que ses agents n’avaient pu accéder au contenu de l’iPhone 5c utilisé par le tueur de San Bernardino, Strzok se plaignait de ce qu’il considérait comme un double jeu d’Apple :

Ce qui me met vraiment en colère dans cette histoire avec Apple ? Le fait que Tim Cook joue le coup du défenseur de la vie privée.

« Je sais. Quelle hypocrisie » approuve dans la foulée sa correspondante.

Quelques jours plus tard, après que Tim Cook a publié une lettre ouverte justifiant la décision d’Apple de ne pas accéder aux demandes du FBI, Strzok s’époumone à nouveau :

Oh mon dieu. Et [passage censuré] essaie d’expliquer/défendre la position Apple. En se basant intégralement sur les fausses informations qu’Apple et les groupes de défense de la vie privée sont en train de répandre ».

Plus tard, les deux agents évoquent la manière dont le FBI a pu finalement avoir accès aux données du téléphone via une tierce partie, malheureusement cette partie de l’échange est censurée. L’identité de cette personne ou de cette entreprise est tenue secrète. « Si seulement Tim Cook pouvait disparaitre de la surface de la terre » écrit une autre fois l’agent Strzok toujours en rogne.

Les deux s’effraient également de la nouvelle selon laquelle Tim Cook comptait parmi les personnalités sérieusement envisagées pour devenir co-listier d’Hillary Rodham Clinton (HRC) et, en cas de victoire de celle-ci, d’être le nouveau vice-président des États-Unis.

Qu’Apple soit l’objet de commentaires peu amènes d’agents du FBI n’a rien de surprenant en soi. D’un côté les deux parties collaborent régulièrement dans le cadre d’enquêtes, d’un autre côté les différents verrous installés par Apple dans ses systèmes sont autant de freins pour les enquêteurs. Apple peut offrir son aide, mais jusqu’à un certain point. Une ligne rouge qu’a tracée l’affaire de San Bernardino où le FBI demandait à Apple de fournir un moyen de détricoter les protections de l’iPhone.

Début janvier, un expert judiciaire du bureau ne mâchait pas ses mots à l’égard d’Apple. Un mois plus tard, le patron de la division californienne du FBI, décrivait cette relation sous un angle nettement plus positif, en parlant des échanges techniques réguliers qui ont lieu.

Face au refus d’Apple d’aller trop loin dans ce qu’elle peut proposer, le FBI peut toujours compter sur l’ingéniosité de tierces parties. La société Cellebrite a confirmé la semaine dernière qu’elle pouvait accéder à certains contenus sur des iPhone équipés de la toute dernière version d’iOS 11.

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