Avec AOL, Verizon veut faire sa pub

Mickaël Bazoge |

L’annonce financière du jour a fait résonner les souvenirs dans les mémoires des vieux routiers d’internet : la bulle des années 2000, la folie spéculative, le temps heureux des connexions 56K. Verizon, premier opérateur aux États-Unis, va en effet acquérir AOL pour la somme, presque modeste, de 4,4 milliards de dollars. Modeste en regard de ce qu’avait mis sur la table Time Warner pour acheter le fournisseur d’accès en 2000 : 164 milliards de dollars ! L’heure était alors à la fameuse convergence des tuyaux et des contenus, dont les rêves de splendeur se sont envolés en même temps qu’explosait la bulle internet.

Modeste aussi quand on compare cette somme à ce qu’a déboursé Facebook (21 milliards de dollars !) pour acquérir WhatsApp, qui n’est après tout qu’une application de messagerie instantanée. Depuis 2009 et la séparation d’avec Time Warner, AOL a entrepris une diversification dans les contenus (achat du HuffingtonPost, d’Engadget, de TechCrunch) et la publicité en ligne, avec quelques succès.

Évidemment, on se rappelle surtout des fameux CD glissés dans les magazines promettant tant d’heures gratuites d’accès au web ! Aussi incroyable que cela puisse paraître, la branche FAI du groupe continue d’engranger des revenus : l’accès bas débit reste une réalité dans certains coins aux États-Unis, et cette activité rapporte toujours — 183 millions de dollars au premier trimestre auprès de 2 millions d’abonnés ! L’an dernier, AOL a généré un chiffre d’affaires global de 2,5 milliards, pour des profits se montant à 126 millions.

Mais ce n’est pas cette activité, ni même les contenus en ligne, qui intéressent Verizon. L’opérateur lorgne surtout sur la plateforme publicitaire développée au fil des années, et qui va lui permettre (entre autres choses) de muscler son offre de vidéo à la demande que la société va dévoiler cet été. Pas question pour l’opérateur de se transformer en simple tuyau à la merci des services web à valeur ajoutée qui eux, gagnent de l’argent. Cette hantise est partagée par bon nombre d’entreprises du secteur, comme Orange qui a également investi dans les contenus.

Si les 4 milliards et quelques semblent à la portée de Verizon, il faudra ensuite que les deux sociétés réussissent à fusionner leurs services et leurs cultures d’entreprise. Ça n’a rien d’évident, et les premières victimes pourraient être les sites de presse en ligne dont l’indépendance éditoriale est menacée. Le groupe allemand Axel Springer serait ainsi intéressé par la reprise du HuffingtonPost.

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