Bill Gates : Microsoft était intéressé par WhatsApp

Mickaël Bazoge |
Photo OnInnovation CC BY-ND

Bill Gates a offert au magazine Rolling Stone quelques réflexions sur l’industrie des nouvelles technologies, mais aussi sur son retour à Microsoft auprès de son successeur, Satya Nadella, ses actions philanthropiques (notamment son travail pour éradiquer la polio), la pauvreté, la surveillance vidéo, le réchauffement climatique… Un entretien long et passionnant, dans lequel on apprend par exemple que Microsoft aurait aimé acheter WhatsApp ! Si l’entreprise n’était pas prête à mettre sur la table 19 milliards de dollars comme l’a fait Facebook, le fondateur de Microsoft admet entre les lignes que sa société était intéressée, mais pas pour cette somme folle.

Dans l’esprit de Gates, cette acquisition signifie que « Mark Zuckerberg veut que Facebook soit le prochain Facebook. Mark a la crédibilité de dire « Je vais dépenser 19 milliards de dollars pour quelque chose qui n’a essentiellement aucun modèle économique. » Une manière de dire que cet achat est inconsidéré ? « Je pense que l’agressivité est sage — même si le prix est plus élevé que je l'attendais. » Bill Gates estime que l’acquisition au prix fort de WhatsApp par Facebook valorise les bases d’utilisateurs (environ 42$ par tête de pipe pour l’application de messagerie instantanée) : une fois connectés entre eux, ils ne vont pas que converser par messages texte ; ils vont également échanger des documents, des photos, jouer ensemble… Tout cela peut être valorisé.

Ça n’est pas un scoop, Bill Gates apprécie Mark Zuckerberg : tous deux sont issus d’Harvard, et tous deux partagent les mêmes visions « bornées » de ce qu’un logiciel peut faire. Il compare le fondateur de Facebook à un directeur produit, alors que lui était plus un codeur. « J’ai débuté avec l’architecture, Mark a démarré avec les produits, et Steve Jobs avec l’esthétique ».

Dans les années 90, Microsoft a eu le luxe de tester et de lancer toutes sortes de technologies : la télévision interactive, les porte-monnaies numériques… « Beaucoup [de ces choses] étaient en avance sur leur temps, mais nous pouvions nous le permettre. » Une période qui semble révolue désormais, ou plutôt entre les mains d’autres entreprises comme Google. « Le fait est que la recherche génère beaucoup d’argent », remarque Gates, ce qui permet effectivement d’investir dans des projets qui peuvent mener… nulle part. En terme de projets, l’entreprise va clairement miser sur le cloud : « Office et les autres actifs de Microsoft que nous avons développés dans les années 90 (…) ont duré un long moment. Maintenant, ils ont besoin de plus qu’une remise à niveau », admet-il. L’avenir semble bel et bien appartenir au nuage, ce qui tombe assez bien : Satya Nadella, le nouveau CEO de Microsoft, est justement issu de la branche cloud de l’entreprise.

Bill Gates revient également sur sa relation avec Steve Jobs. La dernière fois qu’il a rencontré le fondateur d’Apple, explique t-il, remontait à deux ou trois mois avant la mort de Jobs. Il lui a ensuite écrit une longue lettre, que Jobs a pu conserver près de lui. « Steve et moi sommes restés en bon contact, et nous avons eu quelques bonnes et longues conversations dans [sa] dernière année, sur nos compagnes, sur la vie, sur les réussites et les échecs de la technologie. »

Bill Gates et Steve Jobs étaient bien sûr très différents, « mais nous étions tous les deux bons pour recruter les bonnes personnes. Nous étions aussi pleins d’énergie et nous travaillions très dur. » Gates revient sur le premier Mac, dont nous avons fêté le 30e anniversaire fin janvier : « [Microsoft] avait plus de personnes attachées [au développement de logiciels pour le Mac] qu’Apple. Mais nous étions très naïfs. Steve nous a promis que cela allait être une machine à 499 $, mais finalement c’était 1 999 $ [NDLR : il était en fait vendu 2 499 $]. Quoi qu’il en soit, le projet Mac a été une incroyable expérience (…) C’était quelque chose de mythique que nous avons fait ensemble. Steve était un génie. »

Plus globalement, Bill Gates se veut résolument optimiste sur l’avenir du monde, malgré les immenses défis (économiques, environnementaux, sociaux…). « Je pense que nous nous focalisons trop sur les aspects négatifs ». Il faudra cependant que chacun fasse des efforts : « ça ne signifie pas, parce que nous sommes toujours passés au travers de nos problèmes par le passé, que nous devrions nous relaxer car "quelqu’un d’autre va se préoccuper" [de nos problèmes actuels]. Je ne le vois pas de cette façon. »

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