Zhengzhou transformée en « iPhone City » à grands coups de subventions

Stéphane Moussie |

« Il y a un vieux dicton chinois qui dit “Si tu construis le nid, les oiseaux viendront.” Et maintenant, les oiseaux viennent. » Li Ziqiang, un représentant de Zhengzhou, ne peut pas mieux expliquer la politique commerciale incitative qui a été menée par sa ville.

En une poignée d’années, Zhengzhou, capitale de la province du Henan au centre-est de la Chine, est devenue « iPhone City », comme la surnomment ses habitants.

L’implantation d’une usine Foxconn d’où sortent un demi-million d’iPhone par jour ne doit rien au hasard. Le gouvernement local a arrosé le sous-traitant d’aides de toutes sortes pour qu’il choisisse cette région plutôt qu’une autre, indique une enquête du New York Times.

Car au fur et à mesure de la croissance mutuelle d’Apple et Foxconn au milieu des années 2000, les provinces chinoises se sont affrontées dans une « compétition olympique », dixit un professeur de politique publique, pour accueillir leurs usines.

Zhengzhou a su séduire le manufacturier avec des aides locales dont le montant total est difficile à évaluer, ces données étant confidentielles, mais grâce à des témoignages et des documents, le New York Times en révèle une partie.

Ainsi, le gouvernement local a distribué plus de 1,5 milliard de dollars pour construire de grandes portions de son usine et les logements des employés. Il a aussi construit des routes, accordé une remise de 5 % sur les factures d’énergie et exempté le sous-traitant d’impôt sur les sociétés et d’autres taxes pendant cinq ans.

Les autorités locales ont également recruté elles-mêmes des travailleurs et payé un bonus pour des objectifs d’exportation atteints. Elles s’étaient également engagées à investir plus de 10 milliards de dollars dans l’aéroport à proximité de l’usine.

Apple, qui était le seul client de Foxconn à l’ouverture de l’usine en 2010 et qui est aujourd’hui encore son principal client, a déclaré au journal être au courant des aides pour les infrastructures de transport, mais ignorer le reste. De son côté, Foxconn a répondu être reconnaissant au gouvernement et a indiqué que ce soutien « n’était pas différent des allégements fiscaux dont bénéficient toutes les entreprises dans le monde entier quand elles réalisent des investissements majeurs. »

Mais la Chine est en train de changer son fusil d’épaule. En 2014, le Conseil des affaires de l’État a missionné les gouvernements locaux d’un rapport sur la suppression de tout traitement préférentiel bénéficiant aux exportateurs multinationaux. Pékin a coupé court au projet devant la gronde d’entreprises multinationales, dont Foxconn, mais les entreprises étrangères ne doivent plus s’attendre aux mêmes aides qu’avant.

Tim Cook en Chine en août 2016. Photo publiée sur le compte Weibo du CEO.

Comme l’ont montré plusieurs péripéties d’Apple ces dernières années, la Chine se montre dorénavant intraitable. L’iTunes Store et l’iBooks Store ont été fermés en avril par les autorités, seulement six mois après leur ouverture. En 2014, le lancement de l’iPhone 6 avait été décalé afin que le téléphone passe un contrôle de sécurité, révèle le New York Times.

Dans ce contexte, Apple fait preuve de toute sa bonne volonté pour ne pas se faire écarter de ce marché stratégique. Investissements importants dans des acteurs locaux, ouvertures de centres de R&D, constructions de fermes solaires, visites régulières de Tim Cook. D’ailleurs, le CEO d’Apple était accompagné de Terry Gou, patron de Foxconn, Xie Fuzhan, gouverneur de la province de Henan, lors de sa dernière entrevue avec les autorités à Pékin.

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