Apple voulait s'acheter PowerPoint

Mickaël Bazoge |

Le monde aurait-il été différent si Apple avait empoché PowerPoint ? Le logiciel de présentation, présenté en février 1987 et commercialisé deux mois plus tard, a été un succès presque immédiat. Si on ose dire, l’outil présentait bien : simple et efficace, il allait rapidement devenir le logiciel préféré des assistants et des commerciaux ! L’éditeur Forethought, qui développait aussi FileMaker Plus — qui allait devenir "le" FileMaker que nous connaissons —, a eu le nez fin avec PowerPoint. À tel point que cette présentation a attiré bon nombre de prétendants.

Tous les géants de l’informatique de l’époque voulaient mettre des billes dans Forethought, dans PowerPoint, ou les deux. Borland, Xerox, Microsoft, et Apple étaient sur les rangs. Robert Gaskins, vice-président de l’éditeur, livre pour Zamzar un témoignage factuel et très intéressant sur la tentative finalement réussie de Microsoft de mettre la main sur le logiciel et le studio. Il donne malheureusement très peu de détails sur l’offre faite par Apple pour acquérir PowerPoint, dont la plateforme de prédilection était le Mac.

En l’espace de quelques semaines, les aller-retour entre Redmond et Sunnyvale, la ville de Forethought, ont été nombreux. Microsoft propose pour commencer de n’acheter que le logiciel pour 5,3 millions de dollars, avec les développeurs du studio qui travailleraient à distance ; mais le gros des fonctionnalités seraient mises au point par Microsoft qui planchait déjà sur un logiciel du même genre. La sortie effective de PowerPoint, le 21 avril, a permis à Forethought de faire monter les enchères : les tests sont encourageants et les premiers clients sont ravis.

Finalement, le 25 juin 1987, l’affaire est scellée : pour 14 millions de dollars, Forethought devient la première "business unit" de Microsoft, une division autonome au sein de la galaxie de l’éditeur de Windows, qui de plus peut rester dans la Silicon Valley. Il s’agissait de la première acquisition d’importance pour Microsoft, qui cherchait « des super produits, des gens fantastiques, et une vision complémentaire ».

La Graphics Business Unit de Microsoft (composée d’anciens de Forethought) en 1992.

Microsoft a mis le paquet pour séduire les ingénieurs de Forethought : non seulement ils pouvaient rester à Sunnyvale, mais encore les effectifs bénéficiaient des mêmes avantages que les employés de Redmond : Gaskins cite pour l’anecdote des bureaux fermés pour tout le monde, ainsi qu’un accès e-mail. Un privilège encore rare pour 1987.

Même si PowerPoint est parfois (souvent) sujet de moqueries pour ses animations et ses clip-arts trop vus, il n’en demeure pas moins un des modules les plus importants de la suite Office. De son côté, Apple a développé des logiciels concurrents, d’abord avec l’intégré bureautique ClarisWorks (devenu AppleWorks), puis avec Keynote.

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