Scott Forstall : le "mini-steve" d'Apple

Florian Innocente |
scott

Responsable du développement d'iOS et membre de l'équipe dirigeante d'Apple, Scott Forstall fait l'objet d'un portrait contrasté chez Businessweek. Le "senior vice president of iPhone Software" est arrivé chez Apple dans les pas de Steve Jobs, en provenance de NeXT (où il a été embauché dès sa sortie de Stanford). Son goût pour la chose informatique remonte à son enfance et il est partagé dans la famille, l'un de ses trois frères est ingénieur en design logiciel chez Microsoft depuis 20 ans.

Il a participé à la mise sur les rails de Mac OS X, à la création de l'interface Aqua (en tant que directeur de ce projet) puis il a directement supervisé le développement de Leopard avant de passer à iOS (lire aussi Apple : le jeu de cadres). Il a été vu comme doté d'un «réel talent et rapidement considéré comme une étoile montante» dit aujourd'hui de lui Fred Anderson, l'ancien directeur financier d'Apple. Âgé de 42 ans, il est le plus jeune de l'actuelle équipe dirigeante. Et le système dont il a la charge pilote des appareils qui comptent aujourd'hui pour 70% du chiffre d'affaires d'Apple.

Mini-steve
Businessweek a comptabilisé au moins 50 brevets où figure son nom, des inventions qui vont de la présentation des icônes sur l'écran des appareils iOS jusqu'à la manière d'éteindre le téléphone par un glissement du doigt. C'est un homme fort de l'entreprise et qui était proche de Jobs, jusque sur certains brevets où son nom suivait immédiatement celui du patron disparu « Lorsqu’il dit quelque chose, les gens écoutent » se souvient l'ancien responsable de la régie pub iAd.

L'article le décrit en quelque sorte comme un "mini-Steve". Menant ses équipes à la baguette et obsédé par les détails. Capable de traduire en langage intelligible du jargon technique. De la Mercedes à la tenue vestimentaire - jean et haut noir - les points de ressemblance sont multiples avec Jobs. Son équipe n'est pas sans rappeler celle du premier Mac qui revendiquait haut et fort son autonomie vis-à-vis de la division Apple II. «Ils me charrient en me disant qu'iOS enfonce les ventes de Mac» raconte Will Shipley, le patron de l'éditeur Delicious Monster, à propos de ses amis de la division iPhone/iOS.

À ses qualités qui lui ont permis de gagner respect et loyauté de plusieurs membres de son équipe, répondent des critiques justement sur sa manière de travailler et sa relation aux autres. D'après des témoignages d'employés, plusieurs cadres dirigeants ont quitté les rangs d'Apple, fatigués de travailler avec Forstall et de l'entendre répéter « Steve n'aimerait pas ça ». Ce même exode vers d'autres terres aurait aussi eu lieu parmi des ingénieurs.

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D'anciens collaborateurs le décrivent comme prompt à s'attribuer les mérites de succès collectifs, de ne pas assumer des critiques ou des erreurs et adorer verser dans les jeux politiques. Des anecdotes recueillies donnent la vision d'une direction d'Apple moins soudée qu'elle ne le semble. Les relations seraient tendues entre certains vice-présidents. Businessweek écrit que Jonathan Ive et Bob Mansfield (ci-contre, patron de l'ingénierie matérielle Mac et qui a travaillé sur l'iPhone 4) évitent de se retrouver seuls en réunion avec Forstall, à moins que Tim Cook ne soit présent.

D'après des contacts de Businessweek, le départ de Jean-Marie Hullot, proche de Jobs et vétéran de NeXT (lire Une Histoire de smartphones : Apple) aurait été pour partie motivé par la perspective de devoir travailler avec Forstall. Hullot pour sa part affirme qu'il voulait se lancer dans autre chose (on lui doit l'application Fotopedia).

Il y a aussi cette anecdote de Jon Rubinstein, ancien patron de la division Mac puis iPod, qui voyant arriver Forstall à une soirée, la quitta aussitôt (Jobs n'ayant pas pardonné à Rubinstein son arrivée chez Palm on peut supposer que ce ressentiment était partagé par Forstall, ndr).

Mike Lee, un ingénieur logiciel jusqu'en 2010 chez Apple tempère sur ces critiques de la personnalité de «J'ai une fois fait référence à Forstall comme étant un enfoiré de première chez Apple. Mais ce n'était pas une critique de ma part. Je l'ai dit comme un compliment. Vous pouviez dire la même chose de Steve Jobs».

Linux contre Mac OS X
Des luttes internes ont eu lieu au moment de la décision de créer l'iPhone, vers 2005. Deux options s'offraient à Jobs, raconte l'article. L'équipe iPod emmenée par son créateur Tony Fadell, militait pour un OS basé sur Linux (projet Purple). L'autre équipe (projet Purple 2, lire Une petite histoire de l'iPad), pilotée par Forstall préférait adapter Mac OS X. Jobs pour sa part avait une préférence pour la première option, en cela qu'elle paraissait plus flexible et promettait une plus grande marge d'évolution. Mais il décida de mettre les deux équipes en concurrence.

15 ingénieurs de Forstall ont alors commencé à dégraisser Mac OS X pour tenter de le faire fonctionner dans un contexte où l'autonomie est cruciale. S'en est suivi entre les deux équipes et les deux jeunes hommes une compétition "explosive" d'après un ancien employé. Fadell avait 35 ans à l'époque et était le plus jeune des vice-présidents. Forstall agaça Fadell en récupérant les meilleurs ingénieurs et en jouant la carte du secret, refusant de montrer l'avancée de ce qui allait devenir iOS. Le pari de réduire la taille de Mac OS X fut tenu et Jobs opta pour cette solution.

Ce qui mit plus tard les équipes de Fadell (ci-contre) dans une position inconfortable puisqu'iOS arrivant sur les iPod, elles devaient obtenir la collaboration de celles de Forstall pour ajouter une couche logicielle à leurs développements matériels. Et lorsque l'idée ne plaisait pas à Forstall, la demande n'était pas suivie d'effets. Businessweek explique aussi que Forstall insista pour récupérer le développement d'iTunes. Fadell quitta Apple en 2008 (lire Le père de l'iPod quitte Apple & Tony Fadell quitte définitivement Apple). À l'époque il avait justifié ce départ pour des raisons personnelles, il semble néanmoins que les tensions avec Scott Forstall aient pesé de manière importante dans sa décision.

[MaJ] lire : Projet iPhone OS : Fadell donne sa version

Vic Gundotra, senior vice-president chez Google, lui, ne tarit pas d'éloges sur son concurrent «Scott est un type assez étonnant. Pour la direction d'une équipe développant un système d'exploitation, il est l'un des meilleurs que j'ai vu».

Businessweek rappelle toutefois quelques-uns de ses faux pas, anecdotiques ou plus conséquents même s'il n'en fut pas le responsable direct. L'un pendant un keynote où déguisé en scientifique et avec un iPhone il rata une démo supposée être rigolote. Un loupé que Steve Jobs lui rappela à plusieurs reprises en le taquinant lors de réunions qui suivirent. Puis il y eut l'affaire de l'iPhone 4. Jobs souhaitait limiter le nombre de prototypes que les ingénieurs pouvaient transporter avec eux. Forstall réussit à convaincre son patron de laisser quelques dizaines de ses hommes emporter le futur iPhone pour le tester dans les conditions réelles d'utilisation. On connaît la suite.

Des aléas qui n'empêchèrent pas le vice-président de consolider sa position chez Apple. Il poussa aussi au rachat de Quattro Wireless qui devint iAd et se fit l'avocat de l'acquisition de la société à l'origine de Siri. On le dit aussi bien perçu par les développeurs iOS de tierces parties. Une communauté à qui Apple a annoncé avoir reversé 3 milliards de dollars depuis deux ans que l'App Store a ouvert. Des analystes et développeurs qui ont eu à travailler ou discuter avec Forstall soulignent ses qualités d'écoute :

« Forstall prend des notes détaillées, sans stylo, papier, ou ordinateur portable. «Il vous écoute et il commence à taper sur son iPhone», explique Matt Murphy, associé chez Kleiner Perkins et le gestionnaire d'un fonds qui investit dans des développeurs iOS. «Vous pensez qu'il ne fait pas attention à ce que vous dites et qu'il est en train d'envoyer un SMS, et puis vous vous rendez compte qu'il prend des notes.»
Interrogé sur la possibilité de transformer l'iPhone en carte de crédit avec la technologie NFC (communication en champ proche) il a répondu par d'autres questions, sur la manière dont les développeurs pourraient en tirer profit et ce que cela apporterait aux utilisateurs. En clair, une technologie sans usages concrets dès sa commercialisation n'a pas d'intérêt immédiat. Il aurait aussi refusé à de gros développeurs d'avoir un accès prioritaire pour la validation de leurs titres, et ce par souci d'équité.

L'article se conclut sur la relation étroite qui liait Forstall et Jobs. Le second aimait aller voir les futurs développements d'iOS, de la même manière qu'il prenait un plaisir tout particulier à aller jeter un oeil sur les travaux de Jonathan Ive et son équipe, installés un étage plus haut. Tout comme Cook, Forstall a probablement perdu à la fois un mentor et un allié avec la disparition de Jobs.

Sur le même sujet :
- Wired raconte la création de l'iPhone
- Mac OS X : la difficile naissance d'Aqua
avatar nogui | 
Je pense qu'il y a 2 types de réactions : Les commentaires sur le vif, tout le monde en fait, même dans la vraie vie entre amis : Style "Ho la vache , t'as vu sa gueule à celui là !" :-) ou "Houla, quel coupe de cheveux de naze !" :-) Et j'en fait moi aussi, c'est surtout pour déconner ensemble, mais jamais sérieux si on réfléchi 2 secondes .. Apres , sur des forums, et surtout par écrit, qui est quand même un acte plus réfléchis !! je me pose des questions sur les commentaires de certains ... si ils déconnent , juste pour la bonne blague, je vois pas le soucis ... Par contre, si ils écrivent çà sérieusement , comme certains je pense, là je me fait du soucis pour eux dans la vraie vie, ou plutôt pour leur entourage .. :-) Si leurs autres opinions sont du même acabit ... courage fuyons ! Le pire c'est que dans la vraie vie, ils doivent se taire ... mais n'en pensent pas moins , c'est le pire ... Tiens ! Moi aussi je titre des conclusions facile ... Mais bon c'est plus juste avec un écrit qu'avec une photo pas naturelle .. Quant à trouver un type "con" juste avec ce style de photo non naturelle, style "trombinoscope d'entreprise" préparée , et avec le photographe qui demande la pose et le sourire .. J'aimerai bien voir celles prises dans les même conditions de certains contributeurs ici, et surtout que les autres donnent leur avis . Bonne partie de rigolade surement ! Qui commence ? :-)
avatar béber1 | 
:glasses:
avatar Askar | 
Il est un bon atout pour le Apple sans Steve

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