La méthode Apple (ter)

Christophe Laporte |
Baisser le prix de l'iPad 2 de 100 € à quelques semaines des fêtes de fin d'année ! Une idée qui plairait sans doute à bon nombre de personnes qui hésitent à acheter une tablette, mais qui terrorise la concurrence. Car si les Mac sont souvent plus chers que leurs « équivalents » dans le monde Windows, la donne dans le monde des « gadgets » (de l'iPhone à l'iPad en passant par l'iPod) est toute différente. Dans sa dernière étude, iSuppli a analysé la méthode Apple…

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489 €, c'est le prix de vente du premier iPad. Lorsqu'elle a présenté pour la première fois sa tablette, Steve Jobs a fixé en quelque sorte le prix pour ce type d'appareils. Apple l'a fait avec beaucoup de malice et d'intelligence : quelques mois avant sa commercialisation, elle avait fait courir le bruit que celle-ci serait vendue un peu moins de 1 000 €. À ce prix-là, la concurrence était susceptible de rivaliser avec l'offre d'Apple.

Depuis maintenant quelques mois, la concurrence s'agite, les rivaux de l'iPad 2 se multiplient. Certains rivaux sont même vendus légèrement moins chers, c'est le cas notamment de l'Asus EeePad Transformer vendu autour de 400 € sans sa station d'accueil. Mais là où Apple réalise quoi qu'elle en dise de confortables marges, ses concurrents, dans le meilleur des cas, ne perdent pas d'argent mais n'en gagnent pas pour autant…

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C'est un peu le même scénario sur le marché des smartphones. Alors qu'Apple réalise de très grosses marges sur l'iPhone 4 et l'iPhone 3GS (lire : Une marge estimée à 60% sur les iPhone), HTC est le chouchou des investisseurs, car elle réalise une marge de l'ordre de 15 %. Ces derniers sont cependant très inquiets des répercussions que pourrait avoir la guerre des brevets que se livrent Apple, Microsoft et Google sur les marges de la société asiatique. Comme quoi, le procès entre Apple et HTC est loin de n'être qu'une « distraction » comme le déclarait récemment son PDG dans les médias (lire : HTC attaque Apple en Grande-Bretagne).

Par tout temps, la marque de fabrique d'Apple a été de maîtriser à la fois le logiciel et le matériel. C'est très certainement le point de départ de la réussite d'Apple dans l'électronique grand public. Mais avec ses terminaux, la firme de Cupertino a poussé la logique beaucoup plus loin.

Contrairement à ses concurrents, la marque à la pomme développe son propre système d'exploitation, conçoit elle-même ses produits et certains composants clés comme les puces A4 et A5 et négocie directement avec ses sous-traitants responsables de la production de ses appareils.

CA Apple © Anthony Nelzin

Cette approche verticale poussée à l'extrême permet non seulement à Apple d'être plus réactive que ses concurrents, mais de faire des économies. Le fait d'utiliser son propre système d'exploitation qui est vraiment optimisé pour ses besoins lui permet de commercialiser une tablette avec deux fois moins de mémoire vive que la concurrence, et ainsi d'économiser sur chaque terminal environ 14 $ selon iSuppli. Ce qui est remarquable avec cette approche, c'est que l'iPad n'a jamais souffert de la comparaison avec ses concurrents en matière de performances, puisqu'elle se soustrait de la course à la puissance brute.

En poussant cette logique du sur-mesure à l'extrême, Apple peut également faire la différence en matière de design. Elle est en mesure de commercialiser des produits plus fins et dotés d'une meilleure autonomie.

Une formule magique que la concurrence a bien du mal à reproduire. Même HP, qui a sur certains points une approche similaire à Apple, ne parvient pas à faire aussi bien. Lorsqu'ils avaient démonté la TouchPad, les observateurs avaient été frappés par le fait que celle-ci avait été construite comme un PC (lire : HP a construit sa tablette comme un PC).

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Image (cc) iFixit


À cela, il faut ajouter qu'Apple a atteint une masse critique qu'elle n'avait pas par le passé. Avec son statut de plus grand consommateur de mémoire flash au monde, Apple fait la pluie et le beau temps sur ce marché. la firme de Cupertino est traitée de manière prioritaire et obtient sa mémoire à un prix défiant toute concurrence.

La marque à la pomme est parvenue à reproduire le même schéma avec les écrans multitouch. En commandant d'importantes quantités d'écrans, elle ne laisse que des miettes à la concurrence, qui aurait de toute manière bien du mal à fabriquer ses produits par millions si le succès commercial était au rendez-vous (lire : Écrans tactiles : Apple met les concurrents de l'iPad dans l'impasse).

La pluie et le beau temps, Apple ne le fait pas qu'avec ses fournisseurs — elle se montre également machiavélique avec ses partenaires. Elle profite de l'engouement que suscitent ses produits pour obtenir des conditions extrêmement favorables avec ses distributeurs. Ainsi, les opérateurs subventionnent bien plus le terminal d'Apple que ses concurrents (lire : La subvention de l'iPhone critiquée par la concurrence). Et bien souvent, les marges que dégagent les magasins sur les produits Apple sont bien moindres que celles réalisées sur les produits concurrents.

Pour en revenir aux tablettes, Apple a acquis une belle avance, si l'on en croit Wayne Lam. Dans un entretien donné à CNET suite à la sortie de son étude, l'analyste d'iSuppli estime que sur le front des tablettes, l'écosystème d'Android va avoir du mal à refaire à son retard, faute de masse critique. Le cercle est vicieux : la base d'utilisateur étant très faible, les développeurs ne se précipitent pas sur Honeycomb, qui est en retour moins attractif pour les utilisateurs.

D'autre part, selon lui, les fabricants ont surtout cherché à trouver le bon mix en matière de composants, mais ont complètement délaissé l'aspect logiciel. Ils ont beaucoup de travail s’ils veulent rattraper l'iPad, qui n'aura visiblement pas de problème à être la star de Noël à la fin de l'année.
avatar grav | 
@liocec 'expérience utilisateur baclée' est d'une part subjectif, et d'autre part, c'est aussi l'intérêt de s'appuyer sur un produit déconnecté du hardware, qui permet au fabriquant de fabriquer et au logiciel d'évoluer sans pressions. Pour l'instant, l'écosystème a du mal à se rejoindre, mais le produit tablette en tant que tel devrait quand même bien profiter de ce facteur (vu qu'il n'y a pas autant de dérivés hardware sur une tablette que sur un ordinateur par exemple). disons que ca peut aussi être un avantage (et donner des choses comme les surcouches à Android 'Sense' ou 'Touchwizz' qui bien que jeune ont certaines qualités - pour moi on n'est pas au niveau de iOS mais ça peut convenir au public qui demande une ergonomie correcte).
avatar rolanxo | 
Bravo Biking Dutch Man, on oublie de dire que nous sommes co-responsables de cet esclavage... en grande partie du à nos politiques pour qui le libre-échange est un dogme. Délocalisations, chomage...mais on s'éloigne un peu d'Apple...
avatar florian1003 (non vérifié) | 
@rikki finefleur Ça fait quand même une dizaine d'années qu'on est passés aux euros non ? Je rigole.

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