Bill Atkinson inspiré par une IA très joueuse

Arnaud de la Grandière |
Après que Deep Blue a vaincu Gary Kasparov en 1997, IBM, qui fête cette année son centenaire, s'est mise en quête d'un nouveau défi, un seuil symbolique à franchir pour illustrer les avancées en matière d'intelligence artificielle. Et le défi qu'elle s'est imposée laisse songeur : mettre au point une machine capable de battre les plus grands champions du jeu télévisé Jeopardy !

La gageüre est de taille, puisque le principe du jeu exige non seulement la meilleure compréhension du langage, mais également nombre de références culturelles : les joueurs choisissent un thème (parmi six) et l'un des cinq niveaux de difficulté. L'animateur donne une réponse, et les candidats doivent donner la question qui y correspond. Les indices sont souvent dissimulés dans les réponses sous forme de jeux de mots, double-sens, ironie, diverses figures de style, et autres références culturelles qui sont autant de chausses-trappes pour une intelligence artificielle. « Un grand maître Jedi il est » fait de toute évidence référence à Yoda, encore faut-il que Watson décèle l'allusion dans la simple inversion syntaxique.

Le logiciel d'IBM, nommé Watson (du nom du fondateur de la société), a d'ores et déjà participé à un match d'essai face à la presse et à deux champions du jeu le 13 janvier, (Watson fera face aux deux meilleurs champions du Jeopardy lors d'une rencontre retransmise à la télévision le 14 février). Si Watson n'a pas tenté sa chance à chaque question, il ne s'est pour autant jamais trompé lorsqu'il l'a fait, ce qui lui a permis de remporter la partie. Un seuil important pour le logiciel, qui s'est beaucoup trompé depuis le lancement du projet en 2007.



Car s'il y a de quoi être impressionné par Akinator, qui devine la plupart du temps la chose à laquelle vous pensez en moins de 20 questions auxquelles vous ne répondez que par oui ou non, que dire alors des capacités de Watson qui en fait autant sur une seule déclaration cryptique? Le langage et la culture sont des terrains bien plus difficiles à baliser qu'un échiquier, et Watson parvient non seulement à répondre correctement aux questions, mais également à battre des humains à leur propre jeu.

Mais derrière le cas d'école se cachent nombre d'applications pratiques : IBM ambitionne, derrière Watson, de mettre au point un logiciel capable de répondre à des questions en langage clair sur tout type de bases de données. Watson se promet donc à un avenir de documentaliste.

La technologie a manifestement fait forte impression auprès de Bill Atkinson, une légende du monde Mac puisqu'il fut le créateur de MacPaint et Hypercard, ainsi que de la couche graphique du tout premier système du Mac. Celui-ci a participé à une conférence lors du salon MacWorld qui se tient actuellement à San Francisco. À la fin de son allocution sur les concepts d'interface modernes, il a extrapolé sur les avancées de Watson en imaginant un assistant numérique, logé dans l'oreille à la manière d'une oreillette Bluetooth, et doté d'une caméra, qui partagerait le point de vue de son utilisateur au quotidien. L'assistant pourrait ainsi prendre note, en contexte, de tous les évènements de la journée, comprendre les conversations, pour les rappeler à son propriétaire à la demande, pour des questions qui vont de « Comment s'appelait le restaurant où j'ai mangé la dernière fois que j'étais à New York ? » jusqu'à « Comment s'appelle cette personne qui s'approche de moi ? »

Atkinson espère voir ces technologies mises à disposition pour le grand public d'ici dix ans. La réalité augmentée présente déjà des compléments d'information sur notre environnement sur les smartphones, il n'y a plus qu'à présenter ces informations de manière plus naturelle et mieux intégrée pour le commun des mortels.

Mais si Watson comprend le sens des propositions qu'on lui fait, il ne fait pas pour autant de la reconnaissance vocale : les questions lui sont transmises sous forme de texte numérique une fois que l'animateur en a achevé l'énoncé. Il reste également quelques progrès à faire dans ce domaine pour espérer pouvoir un jour discuter à bâtons rompus avec une machine.
avatar sekhmet | 

Impressionnant, merci pour le lien vers Akinator je connaissais pas. Je pense qu'effectivement un vrai assistant numérique lié à de la réalité augmenté sera le plus gros chantier informatique dans les 10-20 années à venir.
sur la reconnaissance du langage, j'ai été tout de même surpris des progrès de Dragon. je l'avais essayé sur mac il y a plus de 10 ans, mais là sur l'ipad le niveau de reconnaissance c'est vraiment beaucoup amélioré

avatar YARK | 

Echangerais belle-mère contre Watson en vue discussions intelligibles...

avatar babgond | 

Akinator c'est un peu la suite du site http://www.20q.net/ et du jeu Mattel du même non ...

avatar piklo | 

Four ceux ayant vu Iron man, c'est un "Jarvis" en devenir. ça et de l'autre côté, les énormes avancées en robotique type humanoïde, ça laisse de la place à l'imagination pour le futur

avatar iJack | 

@sekhmet
Pour info complémentaire, Akinator existe aussi en tant qu'appli iPhone. Mais celle-ci a toutefois besoin d'une connexion à ses serveurs pour fonctionner.
C'est avec cette appli que j'ai fait sa connaissance (je n'ai connu le site qu'après), et il est assez impressionnant. S'il ne trouve pas, il propose au joueur de rentrer la réponse dans sa base. La fois suivante, il est donc meilleur ! Redoutable, et très amusant en famille :)

avatar Manueel | 

Mon dieu que les ordinateurs sont bèèèètes ;-))
"Mais si Watson comprend le sens des propositions"
Faudra-t-il des décennies ou des siècles avant qu'un ordi "comprennent le sens" de quoique ce soit
difficile à dire... peut-être cela n'arrivera jamais.

avatar pandore844 | 

Skynet is coming... ^^

avatar DrFatalis | 

Le test de Turing mes semble désormais validé.
Les machines pensent.
It from bit.

avatar Manueel | 

DrFatalis Le test de turing s'appuie sur la faiblesse de l'observateur humain et non sur une hypothétique intelligence de la machine. Non les machines sont loin de penser (mais probablement ton message était au second degré)
ps : avant de parler d'intelligence des machine, il serait nécessaire de définir le terme.
Mon dieu que les ordinateurs sont bèèèètes ;-))

avatar ezmac | 

non merci, ça fait de nous de machines... tien Terminator pointe du nez !!!

avatar Jside86 | 

Je suis d'accord Skynet is comming 2012...parlant de 2012 je paris que apple va sorti un nouveau iBidule le 21 dec 2012... Le ipocalipse

avatar USB09 | 

Un pas de plus vers skynet...

avatar marc_os | 

@ jside86 : ce ne serait pas plutôt le 20 ? (20/12/2012)
;P

avatar Switcher | 

[i]"- Comment s'appellent ces personnes qui s'approchent de moi ?
- Gontran et Mohammed. Ils vont vous casser la gueule dans 5, 4, 3, 2…"[/i]

Génial le futur, on connaîtra tout de nos agresseurs avant d'être touchés.
Le Meilleur des Mondes.

avatar rom54 | 

L'intelligence artificielle se développe et effectue ponctuellement des pas de géant. C'est normal, ce sont les gens les plus intelligents, justement, de la planète qui y travaillent. La prochaine évolution majeure de l'interaction homme-machine, c'est bien l'interaction verbale qui a fait de sacré progrès ces derniers temps, mais y a encore du boulot, ne serait ce qu'a cause de l'incohérence de la majorité des langages humains...

Ce qui me surprend toujours, c'est qu'a mesure que l'intelligence artificielle évolue, que les neurosciences progressent (et ces deux la ont sacrement évolué ces 10 dernières années), eh bien c'est la bêtise humaine qui progresse et qui est valorisée.

Akinator est une reproduction de ce que fait un mentaliste, le tout connecté a une grosse base de connaissance. C'est impressionnant, mais c'est juste une modélisation de techniques de spectacle

On pourrait y voir une relation, mais il n'y en a pas.
On dispose de toujours plus de connaissances sur notre cerveau, sur notre fonctionnement, nos machines sont de plus en plus performantes. Paradoxalement, nos systèmes éducatifs, sont de moins en moins efficaces, notre accès a la culture et la connaissance est de plus en plus restreint (mercantilisme et nivellement). Nous sommes toujours plus incité à la futilité, à la superficialité, à l'instantanéité. On devient de plus en plus émotionnelement automatique et de moins en moins rationnel ou même pragmatique.

Google, Facebook, et d'autres boites de pub disposent d'algorithmes capables de modéliser nos comportements, nous catégoriser, nous identifier sur une photo.
Mais qui sait que ce mépris que l'on a envers cette personne que l'on a admiré, n'est qu'un automatisme inéluctable?
Qui sait que le stress est un signal d'incohérence dans notre façon de penser, le plus souvent?
Qui sait que l'état de stress génère des maladies?
Qui sait que ces agacements, ces sentiments de ridicule sont des automatismes sociaux?
Qui sait actuellement que ses états émotionnels sont des automatismes primitifs, qui nous manipulent et qui nous rendent manipulable?
On connaît le nom d'artistes éphémères, on admire ou on hait des "people", ces gens qui sont des produits markettés de consommation instantanée. On manipule notre affectif en anesthésiant notre intelligence, on nous conditionne à réagir, à décider, sans réfléchir, juste par une sympathie installée, une sensation de connue... Oui cette boite de biscuits nous parait attirante, car son apparence nous est connue, comme les 10 autres du rayon, mais qui regarde la composition?

On connait le nom et la vie d'un animateur télé, d'un sportif, d'une jetsetteuse, d'un chanteur... Mais qui connait, McLean, Skinner, Bateson, R.Sapolsky,...?

Pour citer un de mes enseignants: "L'intelligence artificielle se développe, tant mieux. Les artificiellement intelligents se développent, hélas"

@Manueel
les machines sont aujourd'hui pratiquement capables de reproduire les comportements et la pensée émotionnelle. La pensée conditionnée, émotionnelle, est un automatisme, donc modélisable et reproductible par une machine. La limite reste pour l'instant la limite de puissance de calcul permettant d'intégrer l'incohérence due à la masse d'automatismes concurrents. De même le processus déductif rationnel et linéaire, est algorithmique, donc reproductible. Ce qui existe en partie dans les systèmes expert. Par conséquent le test de Turing est en partie validable, car au niveau des automatismes émotionnels et du raisonnement simple, on ne peut distinguer une personne d'une machine. Mais comme tu le dis, le test de Turing ne va effectivement pas plus loin que ca et il n'est pas un test d'intelligence. La pensée intelligence humaine, c'est a dire la compréhension systémique intégrant les sens, la conceptualisation et la réflexion étendue, est encore inaccessible aux machines car elle fait partie des domaines incalculables.

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