Une partie de ping-pong

Christophe Laporte |
Devant un parterre d'actionnaire, Steve Jobs s'est livré hier pendant quarante-cinq minutes au jeu des questions réponses. Le cofondateur d'Apple a essayé de convaincre les investisseurs sur certains points de la stratégie de son groupe qui portent souvent à discussion. Avec le mécontentement grandissant de certains revendeurs qui intentent actuellement des procès à l'envers de Cupertino, cette réunion annuelle avec les actionnaires était plus attendue qu'à l'accoutumée.

Il a été notamment reproché au patron d'Apple sa politique d'annonces. Fréquemment un produit est annoncé puis arrive dans le commerce avec un retard plus ou moins important sur la date prévue. Steve Jobs a expliqué que choisir le moment pour présenter un produit était une science extrêmement ardue et qu'il est intéressant parfois de dévoiler une nouveauté un peu à l'avance pour s'assurer une couverture médiatique appréciable. Quand Cupertino donne une date de sortie, elle croit véritablement pouvoir fournir ses fournisseurs en temps et en heure, mais on n'est jamais à l'abri de problèmes de production surtout lorsque l'on innove en permanence, a-t-il déclaré.

Autre grand point abordé au cours de cette discussion, le déclin de la part de marché du Macintosh face au PC. Là encore, les dirigeants de Cupertino ont répondu que ce n'était pas une fin en soi. Apple a trois objectifs primordiaux selon Steve Jobs. Le premier est de satisfaire les vingt-cinq millions de clients fidèles à Cupertino depuis des années. Le second est d'élargir le plus possible cette clientèle. Ensuite Apple tente de croître plus vite que ses concurrents. Tim Cook a d'ailleurs tenu à expliquer qu'au lieu d'attacher de l'importance à la part de marché global d'Apple, il fallait mieux regarder cette évolution secteur par secteur. Ainsi dans l'éducation, domaine qui est cher à la firme de Cupertino, le Macintosh a repris un peu de terrain cette année. Pour expliquer la faible croissance ces derniers trimestres des ordinateurs estampillés d'une pomme par rapport à ses concurrents, les responsables d'Apple évoquent deux raisons. La première est que le Mac n'est pas présent sur le marché bas de gamme qui n'est rentable pour personne à l'exception de Dell selon eux. D'autre part, le Macintosh n'est pas ou peu présent dans les grandes entreprises qui sont actuellement l'un des moteurs de la croissance de l'industrie du PC. Une nouvelle fois, Steve Jobs a comparé Apple à BMW rappelant que les clients de ce dernier se souciaient peu de sa part de marché. Au lieu d'entrer dans une guerre des prix sans merci, la Pomme a préféré investir dans iPod qui est à tous les niveaux un véritable relais de croissance. Leader de ce marché en pleine émergence, Cupertino estime que l'accord proposé par Real Networks n'est pas intéréssant. "Leur boutique en ligne est loin d'être un succès" a déclaré Steve Jobs.

Toujours lors de cette réunion, les dirigeants ont tenu à réaffirmer leur attachement aux revendeurs. La direction d'Apple a rappelé qu'ils représentaient 58 % du chiffre d'affaires du groupe et qu'ils n'étaient donc pas à négliger. Ces propos n'ont sans doute pas rassuré les quelques patrons d'échoppes qui ont fait le déplacement. D'autant plus que Cupertino a fait part de quelques statistiques assez impressionnantes en ce qui concerne ses boutiques. Dans l'histoire de la distribution, c'est une véritable success-story. Aucune société n'est parvenue à réaliser si rapidement une chaîne de magasins capable de générer en si peu de temps plus d'un milliard de chiffre d'affaires. Steve Jobs a tenu à également indiquer que les ventes à l'international étaient un objectif prioritaire pour Apple. Il a rappelé d'ailleurs que Londres et Osaka auraient bientôt un Apple Store. Enfin, la Pomme a affirmé que la fermeture de l'usine de Sacremento permettra à la firme de Cupertino d'économiser trois millions de dollars par trimestre.

Les actionnaires, qui ont de quoi être satisfaits de la performance du titre AAPL sur ces douze derniers mois, ont au final largement reconduit le conseil d'administration. Ils ont également approuvé que KPMG LLP fasse l'audit des comptes d'Apple pour l'année fiscale 2004. En revanche, la motion visant à limiter les sommes perçues par les membres du conseil d'administration et des dirigeants a été rejetée. Apple est dans ce domaine l'une des sociétés les plus critiquées.
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