Linux : changer de numérotation, ou pas

Mickaël Bazoge |

Les numéros de version de logiciels ne sont pas innocents. Un chiffre rond signifie souvent qu’il s’agit d’une version majeure (OS X 10.10, iTunes 12…). Parfois, il arrive même qu’un numéro de version cache la volonté de passer à autre chose, à l’instar de la première version d’OS X ou plus récemment de Windows 10, qui passe carrément Windows 9 à la trappe histoire de faire oublier Windows 8. Enfin, le passage d’un numéro de version important vers un autre peut ne rien signifier, ou pas grand chose : à rythme régulier, Google et Mozilla proposent des versions majeures de leurs navigateurs sans que le monde en soit bouleversé pour autant (c’est aussi le cas pour l’app mobile de Facebook).

Pour le noyau de Linux, c’est plus compliqué. Pendant longtemps, les numérotations avec un second chiffre (2.2, par exemple) annonçaient une version stable; un numéro impair (2.3) signifiait une version de développement. Depuis la version 2.6, la numérotation de Linux a été modifiée et ne reflète plus cette dichotomie entre stable et en développement. Il existe cependant des versions à trois chiffres (2.2.26), le dernier annonçant des révisions mineures (correction de bugs). Il existe aussi une branche à quatre chiffres (2.6.11.6) qui concerne des versions plus stables.

Bref, c’est un peu difficile de s’y retrouver.

À l’occasion de la sortie de la version 3.20 de Linux, son principal promoteur Linus Torvalds tourne autour de l’idée de simplifier la numérotation du noyau. « Je suis une fois de plus en train de manquer de doigts et de doigts de pied », explique t-il sur Google+. Torvalds avait déjà décidé en 2011, et de manière arbitraire, que le noyau allait basculer en version 2.8.0 histoire de simplifier la numérotation. Il demande aujourd’hui à la communauté si le logiciel doit franchir le cap de la version 4.0, ou continuer à décliner les versions 3.20 (« parce que les grands chiffres sont sexy »). Le sondage attaché au billet donne une avance de 10 points à la version 4.0.

La version 3.20 du noyau de Linux n’apporte pas réellement de nouveautés qui justifient une bascule vers ce numéro rond. Mais il en va de même pour Chrome ou Firefox.

avatar tekikou | 

"ou plus récemment de Windows 10, qui passe carrément Windows 9 à la trappe histoire de faire oublier Windows 8"

Ou pas. Voici la raison : http://i.imgur.com/p7eQQK3.png

avatar oomu | 

MERCI de m'y faire penser.

la véritable raison est qu'effectivement, nombre d'apps ne respectent pas la méthode officielle et fonctionnelle de déterminer la version de windows (faut dire aussi que MS a d'abord vendu windows 1 à ME et ENSUITE pensé à le concevoir, à le designer et le construire pour un futur, et j'ironise à peine, merci.)

mais aussi windows 10 va aller très loin dans le branchement de l'API windows SELON ce que le logiciel déclare vouloir (ou croire) comme version de windows.

De fait, Microsoft a été obligé de lâcher 9 pour pouvoir changer de fond en comble la logique de windows tout en trompant les vieux programmes mal maintenus ou oubliés.

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cela n'a rien à voir avec un fantasme marketing (comme vista et 7 : nope) de faire oublier un 8 parce que ho mon dieu on demande au public d'ajouter 2 plutôt que 1.

avatar joneskind | 

@tekikou

La question que je me pose donc c'est de savoir si le génie marketing qui a eu l'idée de basculer à la numérotation 7 puis 8 ne l'avait pas vu venir ?

Les mecs ont vraiment honte de rien quand même.

avatar oomu | 

non

encore une fois non, et pourtant j'adore Torvalds. Si je le croisais, je lui paierais à boire, c'est vous dire que je l'adore, mais non.

je vais encore aller à l'encontre de l'histoire que tout le monde est en train d'adopter mais non :

c'était la numérotation (parfois) à 4 (quatre) chiffres qui était la plus simple. (et non l'inverse, ben ouais)

pourquoi ? parce qu'elle correspondait à un formalisme pour les besoins des professionnels et utilisateurs. Ceux qui ont besoin de certitude parce qu'une décision trop tôt peut avoir de sacrées conséquences.

avant:
majeur.mineur.revision.autre

MAJEUR: si ce numéro change, cela signifie de PROFONDES modifications de linux: les logiciels explosent (compatibilité ABI, _binaire_, change). Un gros travail est nécessaire par beaucoup de mondes. C'est ce qui motiva le changement de numéro de la branche 1 pour la branche 2 en plus de la modularisation du noyau.

mineur: ajouts de fonctionnalités, nouveautés, etc. important; mais théoriquement les logiciels vont fonctionner avec comme si de rien n'était

révision: bugs, détails, à juger si ça mérite ou non de mettre à jour le noyau

autre: bah

en clair: c'était UTILE et FORMEL.

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l'usage du numéro impair pour "développement" n'a jamais vraiment marché. En réalité, le noyau est, comme TOUT LOGICIEL CRITIQUE, constamment en développement, surveillance, bugfixes et paranoia mode: il est trop important.

de fait, ce sont les distributions et d'avoir plusieurs versions de recul qui assuraient si on pouvait dire "STABLE" (stable ne signifie pas que ça n'a pas de bug, etc comme vous fantasmez avec Yosemite/OsX, mais que le noyau fonctionne comme prévu, un comportement prévisible, on a pas besoin de le patcher en urgence en pleine nuit)

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A partir de 3, c'est un peu l'improvisation: On augmente le numéro qu'importe ce que cela signifie, et genre on passerait à 4 pour le "fun" (à la rigueur si effectivement le noyau devenait modifiable à chaud, je pigerai que wahouu, augmentons le numéro!)

je suis désolé, mais si on peut rigoler avec Firefox et Chrome pour faire les kékés dans les news des sites de news à pub, le noyau linux lui est une fondation pour des produits en tout genre. C'est une BRIQUE

et une brique devrait avoir un formalisme clair et STABLE (qu'on cesse de changer pour autre chose tous les 5 ans !) pour savoir comment se situer face à une nouvelle version.

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Apple peut s'amuser à faire le kéké avec ses noms d'animaux et de trucs en Californie, mais derrière, vous avez le même formalisme de numéro de version depuis 1999 et surtout le numéro de BUILD. Et pourtant cela n'est que pour l'usage interne d'Apple, vu que leur noyau et os est inutilisable pour construire par dessus d'autres produits et on a de choix que les versions officielles mises en circulation d'os x.

bref, manifestement, "linux est une chose trop sérieuse pour être confiée à des linuxiens".

avatar joneskind | 

@oomu

Merci pour ce commentaire éclairé.

avatar lmouillart | 

"en clair: c'était UTILE et FORMEL."
L'objectif c'est de pousser un maximum de constructeurs à mettre leurs pilotes en upstream et libre.
Donc pas d'ABI, ni d'API stables.
C'est plutôt une bonne idée.

L'important c'est surtout la stabilité des ABI/API au niveau de ce qui est mis en oeuvre par les éditeurs/distributeurs, c'est le boulot de Redhat, SUSE, Debian, Android, ...

avatar Mark Twang | 

@oomu :
Parfaitement en accord avec toi.

avatar Mark Twang | 

@oomu :
D'ailleurs, c'est la numérotation toujours pratiquée par LibreOffice
4.3.6.2 en ce moment :
Version majeure LibreOffice 4 (code nettoyé), déclinaison mineure 3 (fonctions nouvelles), révision 6 (debuggage), 2e version avant publication définitive (contre les régressions).

avatar oomu | 

Maintenant on est au "LTS". C'est ce qui compte: stable pour travailler ou en chantier pour geeker la nuit avec gcc ?

voilà la réalité et non ces sympathiques histoires de gros numéro et pire: autre 10 ou X qui permettent de croire pendant 5mn qu'on est Apple.

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