Foxconn annonce des résultats financiers records pour 2012

Stéphane Moussie |
Hon Hai Precision Industry Co., plus connu sous le nom de Foxconn, a annoncé des résultats financiers excellents pour le dernier trimestre 2012. Le bénéfice net est en hausse de 5,6 % à 1,2 milliard de dollars et il dépasse les attentes des analystes. Les revenus consolidés s'établissent à 38,2 milliards de dollars (+ 6 %).



Pour l'année 2012 dans son ensemble, les résultats sont tout aussi bons. Le résultat net grimpe de 16 % sur un an à 3,17 milliards de dollars. Ce bilan positif est largement imputable au succès d'Apple dont Foxconn est le principal fournisseur d'iPhone et d'iPad.

À ses débuts, la production de l'iPhone 5 avait été écornée par des problèmes de fabrication et une grève de milliers d'employés. La situation s'est depuis améliorée et la production tourne dorénavant sans embûche.
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avatar Anonyme (non vérifié) | 
Il ferait mieux de faire attention à la qualité des nouveaux iPhone... J'ai jamais vu autant de retour que sur l'iPhone 5...
avatar Khadgare | 
@TheOh! Euh tu travail ou pour les voir revenir? Je serais curieux de connaître le taux des ressource opérationnel d'une tel entreprise ... 15%?
avatar Anonyme (non vérifié) | 
Il aurait été étonnant que après les résultats d'Apple plutôt excellent, que ceux de foxcom soit décevants.
avatar 6nema | 
Ils ont quand même réussi à sortir en avant première - et sans le savoir - un iPhone (5) a écran incurvé ! ;-) http://www.iphon.fr/post/iphone-5-plie-garanti
avatar hozuki | 
@6nema : Ils sont fort je trouve !
avatar Luther | 
@TheOh! : Oui ! Tu travaille où?
avatar ThePapyGeek | 
"La situation s'est depuis améliorée et la production tourne dorénavant sans embûche." A grand coups de batons...
avatar YARK | 
Comme quoi les filets anti-suicide ça a du bon...
avatar tyga tiger | 
@YARK : Cynique comme humour
avatar Yarel | 
@ khadgare et luther Encore un effort... Vous finirez peut-être par conjuguer correctement le verbe travailler à la deuxième personne du singulier !
avatar Khadgare | 
Yarel?
avatar RDBILL | 
@Kinky : 'Cool ! Bientôt des chambres individuelles pour les escl... salariés ?' Tu vas un peu vite... Il y a 5 ans ils vivaient dans des huttes de paille en terre battue sans sanitaires et dormaient à même le sol...
avatar Anonyme (non vérifié) | 
En Chine, la vie selon Apple « C’est la première fois que je parle à un étranger. Tu connais Michael Jackson ? J’ai toutes ses chansons sur mon téléphone ! » Minuit trente, devant l’entrée de Hongfujin, une branche de Foxconn qui fabrique l’iPod. Dans la moiteur nocturne de Longhua, la banlieue de Shenzhen, une cohorte de cuisiniers ambulants, le réchaud à gaz soudé à l’arrière du triporteur, sont venus faire concurrence à la cantine de l’usine. Ils haranguent ces milliers de jeunes en veston rose ou noir quittant leur poste de travail le ventre vide. Certains sont curieux et nous abordent de manière candide et enjouée. Pour les clients attablés autour de l’installation de M. Bo Zhang, la portion de nouilles sautées est à 3 yuans. A lui seul, M. Bo en prépare au moins mille par jour. « Les chefs de Foxconn préfèrent garder leurs salariés près des ateliers pendant la pause-repas. Alors, dès qu’on arrive, ces salauds font baisser le prix des plats de cantine à 1,50 yuan, contre 4 yuans le reste du temps ! » M. Bo est lui-même un ancien ouvrier de Foxconn. Il était affecté à l’atelier de laminage des coques métalliques des MacBook. Il se souvient d’une salle mal ventilée et bruyante, de la chaleur suffocante, de cette poussière d’aluminium qui lui recouvrait la peau et les cheveux. A l’époque, non seulement les ouvriers n’avaient aucun contact avec la hiérarchie taïwanaise, mais même les cadres chinois évitaient toute relation avec leurs homologues taïwanais, pourtant décisionnaires. Sans surprise, ses demandes de mutation étaient toutes refusées. Il a quitté l’usine au bout d’un an, en mai 2010. Pour mieux revenir. « Maintenant, ce sont les ouvriers qui me font vivre », s’amuse-t-il. Et tant pis si les rats déambulent sous ses tabourets en plastique et si la fumée des usines se mêle au parfum subtil de la sauce de soja. Autour de son restaurant de fortune, pas de gardien : seulement une foule de jeunes gens fatigués, qui préfèrent la convivialité de M. Bo à la stricte discipline qui règne chez Foxconn, de l’autre côté des portiques de sécurité. D’après eux, les humiliations et les punitions des chefs d’atelier ont cessé depuis le scandale des suicides en série, au cours du premier semestre 2010. « Les managers sont beaucoup plus discrets. En fait, on ne les entend plus. Si on est solide dans sa tête, c’est gérable. Je travaille debout, mais j’ai une pause de dix minutes toutes les deux heures », nous raconte Yang, 21 ans et sec comme un sarment de vigne. Son camarade Cao Di se souvient des vexations passées : « On devait réfléchir à nos erreurs en restant debout, face à un mur, pendant six heures, quand l’objectif de production n’était pas atteint. » Toutefois, le règlement reste sévère : « Evidemment, on laisse toujours les téléphones portables à l’entrée, et on ne peut ni aller aux toilettes, ni parler, ni boire une gorgée d’eau pendant le travail. » Il faut attendre les pauses. A eux deux, les jeunes hommes emballent huit mille iPad par jour, de 8 heures à 19 heures. « Depuis ceux de la première génération, en 2010 », précise l’un, fièrement. Parfois, des bagarres éclatent entre gardiens et travailleurs C’est ici, à Longhua, que le fondateur taïwanais de Foxconn, M. Terry Tai-ming Gou, a construit sa première usine chinoise, en 1988. Engoncés dans un bunker de trois kilomètres carrés cerné par les dortoirs, trois cent cinquante mille ouvriers y fabriquent jour et nuit les imprimantes et les cartouches Hewlett-Packard (HP), les ordinateurs Dell ou Acer, les liseuses Kindle d’Amazon, la PlayStation de Sony et tous les produits de la gamme Apple. Face à l’insatiable demande mondiale suscitée par ces derniers, Foxconn a construit deux usines supplémentaires : l’une, dans le Sichuan, pour les iPad ; l’autre, dans le Henan, pour les iPhone. La production a démarré le 30 septembre 2010 pour la première, en août 2011 pour la seconde. Chacune emploie environ deux cent mille ouvriers. A Shenzhen, depuis le matin, des hommes en costume sombre, imperturbables, s’affrontent aux cartes dans une salle enfumée. De temps à autre, ils jettent un regard distrait en direction de l’écran qui retransmet les images de télésurveillance. Ils gèrent une dizaine de dortoirs aux façades carrelées, comme il en existe partout dans la ville. Les leurs sont séparés de l’atelier B4 de l’usine Foxconn par deux routes à quatre voies que les camions empruntent à toute heure. Du dernier étage, à travers les barreaux des fenêtres, on aperçoit des jeunes hommes en train d’empiler des cartons noir et vert — les couleurs de la marque Acer. Ces gérants récupèrent les loyers de douze mille ouvriers entassés dans mille cinq cents chambres, filles et garçons séparés, pour le compte d’un riche propriétaire. Les machines à laver et les distributeurs d’eau potable sont installés dehors, au milieu des sacs de déchets ménagers jetés depuis les fenêtres et aussitôt éventrés par les chiens errants. Les rideaux de fer du rez-de-chaussée cachent une pléthore de cybercafés illégaux et de salles de jeu en réseau à 1 yuan de l’heure, ouverts vingt-quatre heures sur vingt-quatre, où les jeunes ouvriers peuvent s’évader. Car, faute d’espace suffisant, Foxconn n’héberge qu’un quart de sa main-d’œuvre, sur un « campus avec piscine olympique, salles de gym et hôpitaux », clament les communiqués de presse. L’immense majorité du personnel occupe des dortoirs privés construits à la va-vite, collés les uns aux autres, sur des terrains sans nom de rue. Les ouvriers se retrouvent ainsi à la merci de commerçants de tout poil et d’hôteliers cupides sur lesquels l’entreprise taïwanaise n’a guère de prise. Grâce à la télésurveillance, nos gérants ont surpris quelqu’un en train de jeter un mégot dans l’escalier. Ils envoient un gardien le cueillir fissa. D’après le règlement affiché dans tous les couloirs, le pauvre est bon pour une amende non négociable de 20 yuans. A Longhua, le maintien de l’ordre est l’affaire de sociétés de sécurité privées : des freluquets en uniforme de police, mais sans arme ni insigne. Comme ceux qu’ils surveillent, ce sont des migrants, recrutés devant l’usine. La paie est la même ; seul un képi les sépare. A l’entrée des ateliers, des magasins et des dortoirs, ils infligent des amendes tous azimuts, vérifient les badges et fouillent les sacs à dos. Un appel de détresse à la police, et ce sont eux qui rappliquent les premiers. La plupart se pavanent sur des vélos tout-terrain (VTT), un gyrophare bleu et rouge vissé sur le porte-bagages. Le soir, ils se postent aux extrémités de chaque rue, toutes lumières allumées, faisant croire à des barrages policiers pour mieux contrôler les flux. Parfois, des bagarres éclatent entre gardiens et ouvriers, et c’est alors à la police d’intervenir. « Les forces de l’ordre, les vraies, ne se déplacent que lorsqu’on leur signale un rassemblement inhabituel. Elles se mettent à filmer les meneurs un par un, et les gamins finissent par se disperser », raconte un commerçant. Depuis leur pick-up sophistiqué, les policiers de Longhua actionnent une caméra rotative. Leur hantise, ce sont les tentatives de manifestation, récurrentes dans la province ; en revanche, ils semblent beaucoup plus tolérants à l’égard des innombrables bordels camouflés en karaokés ou en salons de massage. Plusieurs publicités proposent également de faux diplômes, de faux permis de conduire, voire de fausses cartes d’identité. Un fléau, au dire de Foxconn : « Jamais nous ne chercherions à recourir au travail de mineurs. Si des cas étaient avérés, ce serait parce que des travailleurs auraient utilisé de faux documents et feraient plus vieux que leur âge », a déjà déclaré l’entreprise. Des audits menés par Apple en 2011 ont mis en évidence des cas de ce genre chez cinq de ses fournisseurs. Dans cette ville-usine, des écoles de formation continue farfelues séduisent également les ouvriers aspirant à une reconversion. C’est le cas de M. Guo Tan, 25 ans, affecté depuis deux ans à la peinture des coques de téléphone Nokia. Son frère travaille dans une usine de briquets du Zhejiang ; sa sœur, dans une usine de pantoufles à Dongguan (Guangdong). Après le Nouvel An chinois, il a suivi une formation de « marketing en ligne » dans un institut ayant pignon sur rue à Longhua qui lui promettait une nouvelle carrière, un nouveau départ : « J’ai voulu me réorienter car je passe des horaires de nuit aux horaires de jour chaque mois, parfois toutes les deux semaines sans préavis, ce qui m’empêche de dormir correctement. » M. Guo travaille douze heures par jour, six jours sur sept. Contre la somme exorbitante de 4 000 yuans, soit plus du double de son salaire de base, mais « payable en plusieurs fois », il s’est offert trois heures de cours par jour, quatre jours par semaine, pendant deux mois, avec un joli certificat à la clé. Mais ce document n’est pas un diplôme, et la formation n’est reconnue par aucune des entreprises chinoises où il voudrait être embauché. Originaire du Guizhou, l’une des provinces les plus pauvres du pays, il a un objectif : « Je voudrais rentrer chez moi avec une compagne et assez d’argent pour monter ma petite affaire, être mon propre patron. Cela rassurerait mes parents. » Contraint de renflouer son compte, il restera encore quelque temps chez Foxconn. Boissons énergisantes, peluches géantes et bijoux de pacotille A Longhua, la naïveté de la main-d’œuvre n’a d’égal que son appétit consumériste. Dès la sortie de l’atelier, les ouvriers nagent dans un univers de tentations abordables. Les dortoirs les plus proches de chacune des sorties de l’usine (Nord, Sud, Est, Ouest) sont tapissés de publicités lumineuses et sonores pour des téléphones portables ou des boissons énergisantes. Dans la rue, les jeunes gens sont appâtés par mégaphone : pour des peluches géantes, des bijoux de pacotille… ou même des vestes Foxconn contrefaites, à 35 yuans pièce, « quand ils finissent par perdre celle donnée par la direction le jour de l’embauche et qu’ils doivent porter obligatoirement six jours sur sept », dit la vendeuse. Plus loin, sur Minqing Lu, un tatoueur a installé son kit électrique près d’un lampadaire. Le passage continu de camions soulevant des nuages de poussière ne saurait le distraire. Pour 300 yuans, il grave de redoutables dragons sur le torse ou le dos des ouvriers. Quand vient leur jour de repos hebdomadaire, ou mensuel si les heures supplémentaires s’accumulent, ces travailleurs font aussi la queue chez le coiffeur ou louent des patins à roulettes pour mieux se défouler sur la place principale. Cachés sous des banderoles vantant le « développement harmonieux » de Longhua, des haut-parleurs diffusent leurs musiques préférées. A l’écart du vacarme, au-dessus d’un magasin de couvertures, résonnent les chants d’une église évangélique ayant sans doute échappé au bureau des affaires religieuses de Shenzhen. « Dieu vous appelle », peut-on même lire en caractères vert et rouge sur la fenêtre du premier étage. Depuis son ouverture, il y a cinq ans, des ouvriers de Foxconn viennent y prier, pleurer et chanter, de jour comme de nuit. Leurs dons ont déjà permis d’acheter un petit piano et de financer les déplacements d’un pasteur basé à Dongguan. Pour l’instant, pas de quoi perturber les autorités. Et puis, en avril 2011, miracle : le métro est finalement arrivé à Longhua. Toutes les huit minutes, une rame climatisée s’arrête au terminus de Qinghu, avenue Heping Lu, et emmène la jeunesse ouvrière jusqu’à Lohuo, le quartier animé de Shenzhen, frontalier de Hongkong. « Toujours plus de trafics, de tentations et d’insécurité », résume M. Sunny Yang, un ingénieur, de retour d’une soirée badminton entre amis. Il vit à Longhua avec son épouse et sa fille de 2 ans et supporte de moins en moins la cacophonie de la ville-usine. « Même si cela reste une ville qui donne leur chance aux diplômés », croit-il devoir ajouter. Rassurante aux yeux de M. Yang, une population beaucoup plus paisible a fait son apparition dans les dortoirs : les seniors. Ils passent leurs journées assis autour des rares terrains de jeu, et se servent des grillages comme étendoirs de vêtements… pour bébés. Ces sexagénaires n’ont pas déménagé au milieu des usines pour le plaisir, mais parce que leurs travailleurs d’enfants, salariés chez Foxconn, ont fait appel à eux pour s’occuper de leur progéniture. C’est le projet de Lei, 23 ans, originaire du Hunan et mère d’un petit garçon de 2 ans et demi : « Mes parents aussi étaient ouvriers migrants dans la région, et leur hukou rural [passeport interne] ne me permettait pas d’être inscrite à l’école [les migrants n’ont pas les mêmes droits que les urbains, notamment pour l’accès aux services publics]. Alors ils m’ont laissée au village. Durant toute mon enfance, je ne les voyais qu’une fois par an, pour le Nouvel An. Je ne veux pas que mon fils connaisse la même solitude. Je veux lui offrir une scolarité sur place, quitte à en payer le prix », revendique la jeune femme, qui nous fait visiter sa modeste demeure. Pour l’instant, la famille vit à trois dans une chambre de neuf mètres carrés, pour 350 yuans par mois. Juste assez grand pour le matelas, le téléviseur et la poussette du petit. Le mari de Lei assemble les téléphones fixes Cisco, douze heures par jour, six jours sur sept. Il gagne bien sa vie : jusqu’à 4 000 yuans par mois. Lei a arrêté de travailler à la naissance de son bébé. Elle est enceinte de cinq mois. A la naissance du deuxième, elle fera venir ses parents retraités et reprendra le travail, pour doubler le revenu du foyer. Education sexuelle et décoration rose bonbon au centre de santé Qu’en pensent les aînés qui ont déjà quitté leurs campagnes ? « C’est vrai qu’on s’ennuie un peu ici, l’air est pollué, les rues sont sales, il n’y a pas de place pour cultiver son potager et on se sent un peu surveillé avec tous ces gardiens », soupire Mme Jiang, 63 ans. Avec d’autres, elle attend aujourd’hui un livreur hongkongais de lait maternisé importé, « garanti sans mélamine ». A Longhua, de nombreuses mères et futures mères connaissent bien leur corps et leurs droits, ce qui a le don d’agacer leurs supérieurs hiérarchiques à l’usine. « Quand j’ai appris que j’étais enceinte, mon chef d’atelier m’a fait attendre dix jours avant de m’exempter de passage au détecteur de métaux. Et quand j’ai demandé à changer d’atelier, il a refusé. J’ai dû convaincre son supérieur », s’amuse cette jeune femme. Enceinte de huit mois, Mme Jun Hao est désormais préposée à l’étiquetage des cartons d’ordinateur : « J’appose des autocollants pour 3 000 yuans par mois. C’est correct, non ? » Après l’accouchement, elle devrait bénéficier d’un congé maternité de trois mois : « Ma mère n’y croit pas une seconde, mais cela figure bien dans le contrat. » La Chine continentale propose quatre-vingt-dix-huit jours de congé maternité payés 100 % du salaire mensuel moyen de l’année précédente, soit vingt-huit jours de plus qu’à Hongkong. Une mesure facile à faire respecter dans la fonction publique et les grosses entreprises d’Etat chinoises, mais beaucoup moins dans le secteur privé, reconnaît le quotidien officiel China Daily. D’où peut venir la prise de conscience de Mme Jun ? Des heures passées sur les forums de discussion féminins, depuis les ordinateurs des cybercafés pléthoriques ? On en doute, tant ces espaces sont le territoire des garçons, obsédés par les jeux en réseau. Peut-être plutôt des campagnes d’information menées par quelques hôpitaux, comme le centre gynécologique Huaai de Longhua. Dans l’anonymat, jusque tard le soir, les ouvrières viennent avec leur compagnon y glaner toutes sortes de renseignements liés à la maternité ou à la contraception. « Plus ils connaîtront leurs droits, plus ils obtiendront aisément des avancées, et pas seulement sur les salaires. C’est une garantie de stabilité pour Shenzhen », dit-on chez eux. Précision étonnante : malgré une décoration rose bonbon, cet établissement de santé bénéficie d’un partenariat avec l’Armée populaire de libération (APL). La majorité de ses médecins sont des officiers militaires. On reste pantois devant les panneaux d’éducation sexuelle illustrée fixés le long des trottoirs, qu’un gardien nous interdira toutefois de photographier. « L’homosexualité est un phénomène culturel comme le sadomasochisme. Il n’a pas encore atteint sa maturité en Chine », peut-on y lire — manière de dire que la société chinoise ne serait pas tout à fait prête à accepter l’homosexualité. Lorsqu’ils arrivent avec leur baluchon devant l’imposant centre de recrutement, près de la porte Nord, les jeunes migrants découvrent les slogans d’accueil : « Réaliser ses rêves », « Faire fortune ». Ils peuvent contempler des photographies géantes où des ouvriers euphoriques sont déguisés en étudiants de campus américain, un chapeau mortier sur la tête. Plus pragmatique, un panneau rouge rappelle qu’« il ne faut ni diplôme ni argent pour rejoindre l’entreprise », n’en déplaise aux rabatteurs. En mal de commissions, ceux-ci promettent un poste aux candidats déboussolés dès leur descente du métro, en mentant sur le salaire et les horaires. A Pixian, des bus relient les ateliers A, B et C aux dortoirs 1, 2 et 3 Pour conserver sa main-d’œuvre, Foxconn doit désormais ferrailler avec ces patrons de petites usines qui n’hésitent plus à coller leurs offres d’emploi jusqu’aux portes des dortoirs, ni à s’aligner sur les salaires en vigueur à Longhua. Ils profitent de l’environnement high-tech de la zone industrielle pour venir fabriquer leurs propres téléphones, destinés aux marchés modestes des petites villes ou des campagnes chinoises. « Ce qu’on perd en coût de main-d’œuvre, on le récupère dans notre marge, puisqu’on vend directement notre produit aux utilisateurs », explique un homme d’affaires rencontré dans le magasin d’usine Samzong — à ne pas confondre avec Samsung, évidemment. De fait, les téléphones KPT, inspirés des BlackBerry, ou les Ying Haifu, semblables aux Nokia, sont également fabriqués à Longhua. Peut-être même dans ces usines « à louer » que proposent des annonces taguées sur les murs. On quitte Shenzhen Longhua et son univers impitoyable avec le sentiment que, en dehors de leurs stricts horaires de travail, Foxconn n’a plus guère de prise sur ses petits soldats de l’électronique. Loisirs, sommeil, formation, spiritualité, alimentation, pouvoir d’achat et déplacements : autant de domaines exploités par des acteurs externes, souvent prédateurs, parfois bienveillants. Contacté par téléphone, M. Louis Woo, le porte-parole de l’entreprise, confirme ce phénomène, mais ne le condamne pas : « Nous ne pouvons guère contrôler une nouvelle génération d’ouvriers qui a choisi de vivre et de s’épanouir au milieu d’autres jeunes. Nous avons compris que leur obsession n’est plus de retourner à la maison. Même s’ils ne rechigneraient pas à rentrer plus souvent auprès de leur famille, ils veulent vivre, consommer et s’épanouir avec leurs pairs, entre jeunes. » Forte de cet enseignement, la société taïwanaise a choisi de poursuivre son développement ailleurs, vers l’intérieur du pays, dans des provinces certes éloignées des grands ports marchands mais riches de terrains vierges, où il est possible de repenser un complexe industriel de A à Z, et où les édiles locaux lui déroulent le tapis rouge. Comme à Pixian — situé à plus de mille kilomètres de Shenzhen —, dans la banlieue de Chengdu (province du Sichuan), où Danone met en bouteille son eau Robust et où Intel fabrique ses processeurs. Le 16 octobre 2009, soit avant même la vague de suicides du premier semestre 2010, une promesse d’investissement conjoint est signée avec les autorités du Sichuan. Le chantier démarre le 25 juillet 2010 ; la production commence le 30 septembre. Mais une explosion mortelle survient sept mois plus tard. Elle est due à un défaut structurel de ventilation, comme le confirme une enquête du New York Times détaillant les conditions de travail des ouvriers de Chengdu (7). Foxconn y fabrique désormais douze millions d’iPad par trimestre, soit les deux tiers de sa production totale, répartis entre huit ateliers et cinquante lignes de production superposées sur un périmètre de quatre kilomètres carrés. Ici, finis les bordels tapageurs et les karaokés clinquants, les réclames lumineuses, les ateliers de téléphones contrefaits et les églises évangéliques : les ouvriers évoluent docilement dans une ville-usine toute neuve, aseptisée, d’architecture néostalinienne. Des routes à deux fois trois voies relient les ateliers massifs A, B et C aux portes des dortoirs 1, 2 ou 3. Ce sont les bus articulés de la ville de Chengdu qui assurent la navette, de jour comme de nuit — à faible allure, pour échapper aux radars automatiques. Avec les bétonneuses, les camions de marchandises et les voitures de police, ce sont les seuls véhicules que l’on voit circuler dans Pixian. Ce nouvel ensemble industriel, édifié en un temps record — soixante-quinze jours — par Jiangong, une société contrôlée par la ville de Chengdu, se situe dans une nouvelle zone franche ; il est donc exempté d’impôt. L’installation de Foxconn est décrite dans la presse locale comme « le projet numéro 1 du gouvernement du Sichuan ». Pour les beaux yeux de M. Gou, les autorités ont construit six nouvelles routes, deux ponts, 1,12 million de mètres carrés de surface habitable pour les ouvriers. Elles ont dépensé 2,2 milliards de yuans en indemnités d’expropriation pour dix mille familles, dont les quatorze villages ont été rasés dès août 2010 (8). Les nouveaux ateliers Foxconn ne sont guère que d’austères bâtisses blanches percées de milliers de petites fenêtres teintées. Ils s’étalent le long de deux avenues rectilignes aux noms évocateurs : Tian Sheng lu (« ciel victoire ») et Tian Run lu (« ciel profit »). Aucun filet antisuicides n’a été tendu autour des ateliers, comme c’est le cas à Longhua. La main-d’œuvre, moins âgée, est certes moins payée — le salaire de base est de 1 550 yuans, contre 1 800 à Shenzhen —, mais elle est du cru et peut rendre visite à la famille plus aisément. « Culturellement, Chengdu n’a rien à voir avec Shenzhen, qui est une ville composée exclusivement de migrants. Notre usine de Longhua compte par exemple 20 % de jeunes du Henan, 10 % du Sichuan. Mais ici, les travailleurs sichuanais sont entre eux ; ils sont donc plus détendus. Et puis, les gens du Sichuan sont connus pour leur chaleur humaine. On y trouve tellement de salons de thé ! », s’emballe M. Woo, le porte-parole de Foxconn. Pas sûr que ses ouvriers aient le temps de s’y égarer. D’après les témoignages recueillis sur place, les autorités locales se chargeraient elles-mêmes du recrutement — preuve que Chengdu prend ce projet très au sérieux. Chaque village de la province du Sichuan se voit ainsi imposer des quotas de travailleurs à fournir à Foxconn. « J’ai accepté l’offre du chef de parti du village en échange d’une aide administrative : il a fait accélérer mes démarches de mariage avec ma compagne, originaire d’une province voisine. Mais ce n’est pas du travail forcé. Je peux démissionner quand je le souhaite, et notre village peut continuer de recevoir ses subventions du gouvernement provincial », dit Yang, affecté aux stocks. Même les étudiants en informatique ont été mobilisés pour y effectuer leurs stages. « Ces méthodes sont provisoires et correspondent à une phase initiale de développement. Les ouvriers ne nous connaissent pas, ils ne viennent pas d’eux-mêmes faire la queue au centre de recrutement. Il faut donc aller les chercher », commente-t-on chez Foxconn. Chez eux, le taux de rotation du personnel est élevé. Vingt-quatre mille ouvriers (soit près de 7 % de la main-d’œuvre, tous les mois) à Shenzhen Longhua, avance le Daily Telegraph (9). Peut-être beaucoup plus à Chengdu : « Quand des amis ont voulu s’en aller, un directeur des ressources humaines leur a demandé d’attendre. Il avait déjà quarante mille lettres de démission à traiter », nous confie un salarié. Baptisés « Jeunesse joyeuse », mais truffés de gardiens, les dortoirs de Pixian font jusqu’à dix-huit étages, filles et garçons séparés. Ils sont répartis entre les quartiers de Deyuan, Shunjiang et Qingjiang. Chaque ensemble de trois dortoirs propose cantine, supermarché sans alcool, cybercafé, distributeurs de billets, tables de ping-pong et terrains de badminton. Chaque chambrée compte six à huit personnes — pour un loyer mensuel par lit de 110 yuans — et dispose d’une salle d’eau avec toilettes et cabine de douche. Pour économiser du temps et de l’énergie aux travailleurs, leur linge est récupéré par une entreprise de nettoyage. Le cybercafé, plébiscité par la jeunesse ouvrière de Pixian, offre une décoration soignée, l’air conditionné et de larges fauteuils. Les ordinateurs affichent le logo Foxconn en fond d’écran. Le prix de la connexion double au-delà d’une heure, incitant les ouvriers à ne pas trop s’attarder. Seuls les magasins franchisés semblables à ceux des grandes villes, comme Family Mart, ont droit de cité. « Quand on sort de la chambre ou de l’usine, la vie est plutôt chère », regrette Cheng, dont la journée est réglée comme du papier à musique. « Je me lève à 6 heures, je prends le bus à 6 h 40 et je commence ma journée à l’atelier à 7 h 30. Comme je travaille jusqu’à 20 h 30, je suis chez moi à 21 h 10. Ça me laisse une heure pour en profiter avant l’extinction des feux. » Dehors, les vendeurs illégaux de nouilles et de brochettes joueront toute la nuit au chat et à la souris avec les policiers au volant de voiturettes de golf. C’est ce même paysage que l’on achève de façonner dans la banlieue de Chongqing, à trois cents kilomètres de Chengdu. Foxconn déménage ici une partie de son atelier d’imprimantes HP de Shenzhen. La production démarre à peine, tandis que les bus universitaires de Chongqing ramènent leurs flots d’étudiants réquisitionnés pour un stage obligatoire en usine. Ils rejoindront sans doute ces dix mille ouvriers de l’atelier HP de Shenzhen qui ont déjà accepté de revenir vers leur province natale, comme Pan Fang, 22 ans, et ses amis. Leur nouvelle chambre compte huit lits numérotés et huit tabourets. Leur première impression est positive : « Ici, l’air est moins pollué, et Foxconn nous a installé l’eau chaude, la clim’ et même un téléviseur. » Ils savent déjà que leur travail sera identique : ils assembleront chacun six cents imprimantes par jour. Et espèrent que leur salaire suivra…
avatar BlueVelvet | 
@Ste✅e J⛔bs Source? D'où vient cet article? Facile de faire du copier-coller, merci de signaler l'origine...
avatar Anonyme (non vérifié) | 
Jordan Pouille
avatar YARK | 
@@Ste✅e J⛔bs Concernant la forme pas le fond : Comment t'as fait ? Les réactions sont limitées à 2000 caractères.
avatar Marc-Alouettes | 
@YARK: Il n'y a pas de limite au nombre de modifs
avatar aldomoco | 
@YARK : Il zippe les paragraphes !
avatar Anonyme (non vérifié) | 
@YARK : Les limites c'est fait pour être dépassées !
avatar YARK | 
@aldomoco si, il y a des paragraphes @Ste✅e J⛔bs Bon, on saura pas, en tout cas ton article était intéressant.

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